Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 84.djvu/219

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’écolier obtenus au collège Mazarin, le seul où l’on enseignât alors les hautes mathématiques. Legendre est surtout connu de notre génération par un traité élémentaire de géométrie qui servait encore à l’enseignement classique il y a dix ans : il est en quelque sorte pour nous le pendant du grammairien Lhomond; mais la haute géométrie lui doit d’importantes théories, et notamment celles des fonctions elliptiques. Laplace, Lagrange, Monge et Legendre, ces quatre noms considérables illustrent les dernières années de la section de géométrie, ils forment comme un lien naturel entre l’ancienne Académie des Sciences et la première section de l’Institut qui la remplaça plus tard.

La section d’astronomie a de son côté de glorieux états de service. Lalande, qui n’était guère porté à la louange, écrivait en 1766 : « La collection des Mémoires de l’Académie des Sciences renferme le plus riche trésor que nous ayons en fait d’astronomie. La découverte des satellites de Saturne, l’étude consciencieuse et prolongée de la grandeur et de la figure de la terre, l’application du pendule aux horloges, celle des lunettes aux quarts de cercle et des micromètres aux lunettes, des discussions continuelles et savantes sur la théorie du soleil et de la lune, leurs inégalités, les réfractions, l’obliquité de l’elliptique, la théorie des satellites de Jupiter, tout cela se trouve longuement développé et traité à bien des reprises dans cette collection, dont l’analyse formerait, si on le voulait, un traité complet d’astronomie. » Nous avons déjà indiqué comment les recherches astronomiques occupèrent une place importante dans les premiers travaux de l’académie. L’observatoire de Paris fut fondé en même temps que l’académie elle-même; c’est en 1664 que la création en fut décidée, et c’est en 1667 qu’on en posa la première, pierre. Les astronomes du temps n’épargnèrent pas les plaintes au sujet de ce massif bâtiment, auquel on a toujours fait beaucoup de reproches, et qui vient encore de donner lieu sous nos yeux à des controverses animées. Ils prétendaient que l’architecte Claude Perrault n’avait écouté que d’une oreille distraite les recommandations des savans, qu’il avait sacrifié les commodités de la science à la beauté des lignes et à la majesté des formes. Le premier directeur de l’Observatoire fut un de ces Italiens qui depuis les Médicis avaient pris l’habitude de venir chercher fortune en France. Cassini fut recommandé à Colbert par Picard et Auzout, et il éclipsa bientôt ses protecteurs. Homme d’esprit, homme de cour, il sut se pousser auprès du roi. Il apportait dans les questions de science beaucoup de finesse et de perspicacité; mais, sans manquer de science véritable, il savait surtout jeter de la poudre aux yeux. C’était, comme nous dirions aujourd’hui, un « faiseur. » Il excellait à tirer parti de ses collaborateurs et à extraire des circonstances tout ce qui pouvait servir à sa fortune. Ayant trouvé deux nouveaux satellites de Sa-