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noraires, vingt pensionnaires et vingt associés. Les membres honoraires étaient de grands seigneurs à qui l’on ne demandait pas une collaboration effective. Les pensionnaires, recrutés pour la plupart parmi les membres de l’ancienne compagnie, furent partagés en six sections, celles de géométrie, d’astronomie, de mécanique, de chimie, d’anatomie et de botanique. Les associés étaient des sortes d’adjoints dont douze devaient être pris parmi les Français et huit parmi les savans étrangers[1]. Une mesure importante caractérisait le nouvel ordre de choses : l’académie se recrutait elle-même en présentant pour chaque place vacante une liste de trois membres à la nomination du roi. Le système se complétait par l’adjonction d’un élève à chaque pensionnaire. Les pensionnaires choisissaient eux-mêmes leurs élèves avec l’agrément de la compagnie et les soumettaient à la sanction royale; ces jeunes surnuméraires avaient d’ailleurs le privilège de figurer, dans une proportion déterminée, sur les listes de présentation pour les places d’associés[2].

L’académie, ainsi renouvelée et agrandie, fut solennellement installée au Louvre dans un logement spacieux et comfortable. Une nouvelle ère de travail commence alors pour elle. On a renoncé aux plans d’ensemble, à la culture collective de la science. Chacun travaille comme il l’entend, choisit ses sujets de recherches; mais une règle sévère astreint tout académicien à un labeur effectif : sauf les membres honoraires, chacun doit fournir son tribut aux discussions et aux mémoires publiés par la compagnie. Des exclusions rigoureuses sont prononcées non-seulement contre les membres qui, sans excuse valable, restent trop longtemps absens, mais même contre ceux qui assistent aux séances sans y apporter leur part de travail. Ceux dont l’âge a diminué les forces obtiennent seuls, sur leur demande, le titre de vétéran, qui les dispense d’une occupation régulière[3].

Sous l’empire de ces dispositions, le rôle et l’influence de l’académie grandissent rapidement. Elle acquiert une notoriété considérable, et tout ce qui intéresse les sciences vient peu à peu se soumettre à son contrôle; les particuliers, l’administration, prennent l’habitude de la consulter sur les grandes questions où sa voix peut se faire entendre avec utilité. Tous les géomètres, tous les savans, lui adressent leurs mémoires, et elle s’astreint à examiner régulièrement tout ce qui lui est envoyé; de 1699 à 1790, ses archives ne

  1. Les huit, premiers associés (étrangers furent Leibniz, Tchisnauss, Gulhiemini, Hartsœcker, les deux frères Bernoulli (Jacques et Jean), Rœmer et Newton.
  2. Le titre d’élève fut aboli en 1716 par une ordonnance du régent, et remplacé par celui d’adjoint.
  3. Le titre de vétéran fut accordé successivement à Saurin, à Jacques Cassini, à Maraldi, à Fontenelle, à Leymery, à Mairan, à La Condamine et à Grandjean-Fouchy.