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anglaise à tenter fessai d’un chemin de fer d’invention nouvelle, et qui est aujourd’hui en exploitation.


II.

Personne n’ignore que sur les chemins de fer ordinaires les rampes à franchir doivent être très faibles et les courbes très peu prononcées. Cette condition est la cause principale des dépenses qu’exige l’établissement d’une voie ferrée, puisque les tunnels, les viaducs, les ouvrages d’art, n’ont d’autre objet que de rendre la voie aussi plane et aussi droite que possible. Dans un chemin de fer en effet, le moteur est la locomotive, que mettent en mouvement les pistons de deux cylindres à vapeur fixées par une manivelle aux roues motrices. Or il est évident que la puissance de traction dépend de l’adhérence de ces roues sur les rails, et cette adhérence est proportionnelle à la charge des essieux, c’est-à-dire au poids de la machine. D’un autre côté, l’effort qu’il faut développer à la montée des rampes augmente avec l’angle d’inclinaison de la voie, tandis que l’adhérence des roues diminue, puisque celles-ci, entraînées par la pesanteur, tendent sans cesse à redescendre. La résistance à la traction devient ainsi très rapidement supérieure à la résistance du point d’appui, et rend impossible l’ascension de rampes un peu fortes.

La vitesse d’une locomotive dépend du diamètre des roues motrices, puisque, pour un même nombre de coups de piston, une roue d’un diamètre considérable parcourt plus de chemin qu’une roue d’un diamètre moindre. Les machines à grande vitesse n’ont que deux roues motrices, situées à l’arrière, afin que le diamètre puisse en être augmenté sans que le centre de gravité soit déplacé, ni que la stabilité soit compromise. Ces machines ont beaucoup moins d’adhérence sur les rails que celles dont toutes les roues, placées sous la chaudière, sont couplées entre elles; elles ne peuvent par conséquent traîner qu’un poids plus faible que celles-ci et gravir des rampes beaucoup moins fortes. Lorsqu’il s’agit de surmonter ces difficultés, la vitesse doit donc en tout état de cause être sacrifiée. Les rampes ordinaires des chemins de fer varient entre 3 et 8 millimètres par mètre en plaine; en montagne, elles vont jusqu’à 30 millimètres. Au-delà, ce sont des rampes exceptionnelles, qu’on ne peut gravir qu’avec un matériel spécial. Telle est la rampe du chemin de fer de Saint-Germain, qui a 35 millimètres, et celle du chemin de fer d’Enghien à Montmorency, qui en a 45.

Pour les courbes, la difficulté est la même. Afin de donner plus de solidité à la locomotive et aux voitures, les essieux des roues