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transaction ; c’était, à vrai dire, ce qu’il y avait de mieux et de plus simple. D’abord le jeune roi de Bavière tient à son premier ministre, le prince de Hohenlohe, et se serait difficilement résigné à se séparer de lui ; puis enfin, M. de Hohenlohe restant aux affaires, ce n’est rien de plus, rien de moins que le maintien de ce qui est, de la politique actuelle, avec l’obligation de tenir compte des manifestations récentes du pays dans le sens de l’autonomie et de l’indépendance. On évite ainsi les oscillations brusques, une réaction dangereuse dans la politique intérieure, les froissemens ou les chocs avec la Prusse. On n’empêchera pas toutefois que d’ardens débats ne se produisent dans les chambres bavaroises qui vont bientôt s’ouvrir. La question allemande sera sans doute agitée avec passion dans le parlement, comme elle l’a été dans les élections. Elle n’avancera pas beaucoup, c’est vraisemblable ; les discussions bavaroises peuvent du moins donner la mesure du progrès des choses au-delà du Rhin.

Cette question allemande, elle sommeille pour le moment. On ne peut cependant y toucher d’une plume un peu libre sans la réveiller, sans remettre en mouvement toutes les susceptibilités prussiennes. Il a suffi à notre collaborateur M. Cherbuliez de vouloir débrouiller cette confusion allemande, et de s’en être tiré en maître, pour provoquer des colères à Berlin et à Cologne. On s’est mis plaisamment en campagne pour découvrir qui pouvait bien se cacher derrière M. Cherbuliez. Peu s’en faut qu’on n’ait mis la main sur l’ennemi qui a pu inspirer de telles choses, et qui se cache sans nul doute quelque part, à Berlin ou à Stuttgard, à moins que ce ne soit à Vienne. Nous allons dénoncer aux journalistes d’outre-Rhin l’inspirateur ou le conspirateur qu’ils cherchent : c’est le peuple allemand lui-même qui s’est dévoilé tout simplement dans sa vérité au regard d’un écrivain de talent, qui n’est ni Français, ni Prussien, ni Wurtembergeois, ni Autrichien, et qui par conséquent a toute liberté d’esprit pour voir, toute indépendance pour juger ce qu’il a vu.

La saison est aux crises ministérielles, disions-nous. La Bavière a eu la sienne ; l’Italie de son côté a sa crise plus grave, qui se prolonge depuis quinze jours. L’ancien cabinet du général Ménabrea et de M. Cambray-Digny a donné sa démission à la suite du vote hostile qui a élevé M. Lanza à la présidence de la chambre, et depuis ce moment l’Italie est dans le pénible enfantement d’un ministère. Deux choses sont à remarquer dans ce singulier interrègne. La première, c’est le calme complet du pays qui assiste à toutes ces péripéties intimes sans se troubler. C’est à peine si à propos du concile qui a été inauguré à Rome il y a eu quelques manifestations dans les Marches et à Naples, où on a essayé de faire un anticoncile de libres penseurs. En réalité, s’il y a une certaine préoccupation, il n’y a pas même un commencement d’agitation au-delà des Alpes. La seconde chose caractéristique dans cette crise ministérielle italienne, celle qui explique peut-être la première, c’est