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George Ier donnait son concours à cette mesure essentiellement libérale que Stanhope et Suhderland opposaient d’avance aux empiétemens prémédités, selon eux, par le futur roi d’Angleterre ; il s’agissait aussi de refréner les ambitions égoïstes des favoris allemands, qui tous, en vue d’un avenir incertain, voulaient abriter leurs rapines sous le titre de lord et les privilèges de la pairie. On se demande comment les whigs opposans purent se croire autorisés en. cette circonstance à marcher d’accord avec les tories, Townshend menant les uns, lord Nottingham à la tête des autres. Il est difficile de ne pas constater ici l’énorme influence que les calculs d’intérêt personnel exerçaient sur la direction politique des diverses fractions parlementaires[1].

Quoi qu’il en soit, le rejet du peerage-bill alarma le gouvernement ; George Ier se hâta de quitter son cher Hanovre, où il était retourné au mois de mai 1719 ; il revint le 14 novembre pour ouvrir le parlement en personne. A l’occasion de ce voyage, les dissentimens de la famille royale s’aggravant toujours malgré la réconciliation de 1716, il n’avait été question de régence ni pour le prince ni pour la princesse de Galles, qui ne furent pas même chargés de tenir les grands levers à la place du monarque absent. Une clause dérisoire, mais significative, attribuait à leurs enfans (trois petites princesses nées en 1709, 1711 et 1713) ces fonctions purement honorifiques.

Ces querelles publiques dataient du baptême d’un des enfans du prince de Galles. Celui-ci ayant choisi pour parrain le duc d’York, son oncle, le roi voulut, sans raison apparente, que le duc de Newcastle fût substitué, à ce prince, non comme chargé de pouvoirs, — ce qui eût paru tout simple, — mais en son propre et privé nom. Le prince, exaspéré par ce qu’il appelait tout simplement une insolence, adressa au duc de Newcastle, immédiatement après la cérémonie, les reproches les plus durs, et son père, irrité à son tour par ce manque de respect, lui envoya d’abord l’injonction de garder les arrêts, puis celle de quitter le palais de Saint-James, sur quoi leurs altesses royales se retirèrent ensemble chez le comte de Grantham, premier chambellan du prince. Une note fut aussitôt publiée d’après laquelle aucune des personnes qui auraient rendu leurs devoirs à l’héritier présomptif ou à la princesse ne devait plus être admise à la cour. On les privait en outre de la garde d’honneur due à leur rang ; plus tard, les enfans de la princesse, enlevés à leur mère, furent placés sous la direction de lady Portland, et le secrétaire

  1. Ajoutons que ni les whigs opposans ni les tories ne contestaient ouvertement le principe du bill, la limitation des pairs a créer ; mais ils le minaient en détail, insistant sur les vices de chaque clause. Addison écrivit son dernier pamphlet en faveur du bill. Steele se chargea de lui répondre au nom de l’opposition whig.