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L’académie d’Anvers est administrée par le gouverneur de la province, le bourgmestre, le directeur et les échevins. Le directeur et les échevins présentent au roi la liste des membres, qu’on renouvelle tous les trois ans. L’académie a la surveillance du musée et des fonds produits par la rétribution qu’on exige à l’entrée. Le conseil municipal et les chambres votent la dotation annuelle[1]. L’enseignement, réorganisé en 1817, est gratuit, et comprend tous les degrés, depuis les notions élémentaires du dessin jusqu’à l’instruction supérieure. Pour suivre les cours et prendre part aux exercices, les élèves viennent du Brabant, de la Hollande, de la Prusse, de la Saxe, de l’Angleterre, des États-Unis. Ceux qui sont les plus méritans et offrent le plus de dispositions obtiennent, s’ils sont Belges, des secours et des bourses de la ville et du gouvernement. La seule ville d’Anvers dispose d’une vingtaine de bourses. Les communes ajoutent des médailles aux médailles royales, et donnent des livres ou des objets utiles à la pratique de l’art. Il y a des ateliers permanens pour les peintres, les sculpteurs, les architectes, les graveurs en taille-douce. La gravure, si fortement compromise aujourd’hui en France, est très florissante chez nos voisins.

Les concours pour les grands prix n’avaient lieu que tous les trois ans. On a pensé que ce terme devait être rapproché ; il y a concours chaque année pour une des branches de l’art. Telle année les peintres montent en loges, telle autre les sculpteurs. Le dernier concours de peinture comptait six logistes, et le seul programme imposé aux élèves indique suffisamment que les juges du combat siégeaient à Anvers, dans une ville peu accessible aux influences ultramontaines. « Les prêtres d’Athènes, disait ce programme, reconnaissant en Socrate le continuateur des philosophes qui avaient porté tant de coups à la religion, lui vouèrent une haine qui ne fut satisfaite que par sa mort. » L’artiste devait montrer Socrate devant ses accusateurs. Notons un autre détail qui caractérise bien les mœurs du pays. Les loges sont rigoureusement fermées aux élèves durant les trois premiers jours de la kermesse d’Anvers ; il faut se réjouir. Le travail fini et l’arrêt rendu, les œuvres sont exposées à Anvers et à Bruxelles. Le lauréat va partir pour l’Italie, où il voyagera quatre années, pour Rome, où il ne trouvera pas un palais, mais où il aura une liberté entière. Le système de la métropole se fait partout sentir. Une pension annuelle de 3,500 francs lui sera versée. Elle était moindre, on l’a élevée récemment en raison de la cherté de la vie. Non-seulement les compositions qu’il enverra d’Italie ne lui seront point achetées par l’état ; mais il devra exécuter

  1. Cette dotation sera, pour 1870, de 86,117 francs, que fourniront par moitié le gouvernement et la ville.