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CHRYSOSTOME ET EUDOXIE.


de donner la sanction légale à cette usurpation des droits des églises, et il avait reconnu le triumvirat ecclésiastique par une loi rendue du vivant d’Arsace, le 18 novembre 404. Cette loi est curieuse, et fera voir quelles étaient à cette époque les relations de l’église et de l’état. Elle se divisait en deux parties d’après le dire des historiens, l’une concernant les assemblées des fidèles hors de l’église et des basiliques, l’autre les peines réservées aux évêques dissidens.

La première était ainsi conçue : « Que les gouverneurs des provinces soient avertis qu’ils doivent empêcher les assemblées illicites de ceux qui, méprisant les églises sacro-saintes, essaient de se réunir autre part, et qu’en outre ceux qui séparent leur communion de celle d’Arsace, de Théophile et de Porphyre (très révérés pontifes de la loi sacrée) doivent être mis hors de l’église comme schismatiques. — Donné à Constantinople le 14 des calendes de décembre, sous le sixième consulat d’Honorius Auguste et celui d’Aristenetus. » La seconde partie de la loi, laquelle ne se trouve pas dans le code, mais a été reproduite par les écrivains contemporains, portait ces dispositions : « Si quelqu’un des évêques refuse de communiquer avec Théophile, Arsace et Porphyre, qu’il soit chassé de son siége, et que ses biens soient confisqués tant en argent qu’en propriétés foncières. »

Ces lois oppressives que la mollesse d’Arsace ne lui permettait guère d’appliquer reçurent une nouvelle vie sous Atticus, qui porta dans l’exécution de ces mesures toute la rigidité de son esprit opiniâtre et froid, tandis que Porphyre, nouveau patriarche d’Antioche, y mettait les violences éhontées qui ont flétri à jamais son nom. Il est souvent difficile, quand on étudie l’histoire des dissensions religieuses, d’accepter comme tout à fait véridique l’appréciation des hommes d’un parti faite par des écrivains du parti contraire, et notre temps démontre assez qu’il peut en être de même dans l’ordre politique ; toutefois le jugement porté sur Porphyre par tous les écrivains ecclésiastiques du temps semble si bien confirmé par sa conduite dans des faits avérés qu’on ne court pas grand risque de calomnier ici un mort en répétant ce que disaient de lui les vivans.

Porphyre avait mené dès son enfance l’existence la moins conforme à l’état qu’il voulait embrasser, et ses instincts pervers, nous dit un historien, entretenus et nourris avec un soin tout paternel, n’avaient fait que se développer avec l’âge. Débauché, coureur de futilités et de spectacles, passionné pour les mimes et vivant familièrement avec eux, ce qui était le comble du déshonneur, même pour un laïque, il cultivait en outre les sciences occultes et passait