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plateaux intermédiaires entre la vallée du Bashilo fit la position de Magdala. La seconde brigade établit son camp au bord même de la rivière.

La route qui conduit du Bashilo à Magdala s’engage, en quittant les rives de ce cours d’eau, dans un défilé resserré formé par le lit de l’un des torrens tributaires et dominé des deux côtés par des hauteurs abruptes et élevées. C’est seulement en gravissant les pentes, à l’extrémité de ce défilé, qu’on aperçoit le massif de Magdala dominant tous les plateaux de la rive gauche du Bashilo. La première brigade était forte d’environ 1,900 hommes, et était accompagnée d’une batterie de montagne et d’une batterie de fuséens de la marine. Au moment où la tête de colonne gravissait les pentes qui conduisent aux plateaux, des coups de canon retentirent sur les ambas de Fala et de Sélassé, et des bandes d’Abyssins, se précipitant des hauteurs, assaillirent les troupes anglaises avec une intrépidité qu’on n’eût point soupçonnée. Aucune disposition n’avait été négligée pour éviter toute embuscade et toute surprise ; aussi ce premier choc fut vigoureusement reçu et immédiatement repoussé. En un clin d’œil, l’infanterie fut déployée et prit position sur le plateau ; la batterie de montagne et celle des fuséens ouvrirent sur les masses ennemies un feu meurtrier. L’engagement fut bientôt général ; mais les chances de la lutte étaient trop inégales pour qu’elle pût se prolonger. Disputant pied à pied le terrain avec une énergie trop mal secondée par un armement impuissant, l’ennemi, décimé par les effets foudroyans des projectiles de l’artillerie anglaise et par les décharges meurtrières des fusils Snider, dut se replier en désordre vers ses positions. Les canons de Fala et de Sélassé n’avaient pas cessé leur feu pendant toute l’action, mais aucun projectile n’arriva dans les rangs des Anglais ; ils étaient à une distance qui dépassait la portée du tir, L’infanterie anglaise et les troupes indigènes rivalisèrent d’entrain dans la poursuite ; entre tous, les soldats du Pundjab se firent remarquer par leur sauvage énergie et leur ardeur emportée, que n’arrêtaient ni fourrés ni précipices. Leur régiment fournit à lui seul presque tous les blessés, dont le chiffre total pour les troupes engagées ne dépassait pas 20 ; pas un seul homme n’avait été tué.

La nuit arrêta la poursuite, et peut-être sans cette circonstance l’armée anglaise eût occupé, dès le soir même du 10, les premières hauteurs de la position de Magdala. L’effet produit n’en devait pas moins être décisif. Les pertes des Abyssins étaient considérables ; leur général en chef avait été tué ; près de 400 cadavres furent comptés sur le champ de bataille, et les renseignement les moins exagérés firent estimer à 2,000 hommes le chiffre des tués et blessés. On a prétendu que le roi Théodoros n’avait pas eu la pensée