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était sous la tente. Trois navires avaient été aménagés en hôpitaux pour les malades européens ; les indigènes étaient soignés dans des campemens spéciaux. A Suez, où de vastes emplacemens avaient été disposés pour réunir les animaux prêts à être embarqués, un hôpital organisé sous, des baraques devait recevoir les malades qu’il serait nécessaire d’évacuer. Quant au campement des troupes à Zoulla, il était établi sous de vastes tentes de. divers modèles usités dans l’Inde, plus comfortables peut-être avec leur double abri de toiles formées, elles-mêmes de plusieurs épaisseurs qu’aucune construction légère n’aurait, pu l’être sous ce climat. On a peine, à concevoir comment on peut faire la guerre avec de pareilles tentes, puisque les plus petites forment la charge de plusieurs chameaux et qu’un éléphant ne suffirait pas à porter les plus grandes ; mais employées à Zoulla, au bord de la mer, dans un camp permanent, elles assurèrent à l’armée anglaise l’installation la plus parfaite et la protection la plus efficace contre, l’ardeur d’un soleil de feu.

Telle était la situation de l’armée d’Abyssinie lorsque, le 3 janvier 1868, sir Robert Napier vint en prendre le commandement en chef. Dès ce moment, les affaires allaient entrer dans une phase nouvelle. Le temps marchait, les principaux moyens d’action étaient réunis, et, bien que les travaux de routes ne fussent pas entièrement terminés, que les moyens de transport ne fussent pas au complet, il fallait se porter en avant. Le général en chef séjourna cependant quelques semaines à Zoulla ; il devait se rendre compte par lui-même de la situation des travaux, des besoins qu’on n’avait pas encore, prévus, et pourvoir, par des ordres précis donnés sur les lieux mêmes, aux exigences du rôle qu’allait jouer cette base d’opérations pendant toute la campagne. Des officiers furent envoyés en Égypte pour y faire de nouveaux achats de chevaux : la mortalité avait été très grande parmi les animaux pendant les premiers mois ; des. corps entiers de cavalerie se trouvaient presque démontés. L’activité infatigable du général, cette sollicitude attentive qu’il portait sur les moindres détails et qui devait assurer le succès complet et rapide de l’expédition, trouvaient un aliment dès ses premiers pas dans le pays. Jamais chef n’imprima plus énergiquement son impulsion personnelle que ne le fit sir Robert Napier en Abyssinie. Faut-il s’étonner qu’il ait été aussi bien seconde et qu’une glorieuse issue ait couronné un pareil ensemble d’efforts ?

Après trois semaines passées au camp de Zoulla, sir Robert Napier transporta son quartier-général à Sénafé, où se trouvaient déjà les troupes les plus avancées. Dès lors il ne quitta plus l’avant-garde, et c’est sous sa direction que la tête de colonne fraya au reste de l’armée un chemin jusqu’à Magdala. Sur son passage, le commandant en chef inspecta les travaux qui se poursuivaient dans