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il avait tant besoin de s’affermir. Des circonstances locales d’un tout autre caractère n’ont jamais cessé de gêner ou de ralentir le mouvement de concentration d’où pouvait résulter la formation de la cité. Dès qu’on voit, sous ce rapport, tant de besoins méconnus, quand le vide s’accroît, et que le travail manque de plus en plus d’aliment, on est obligé d’en conclure que des lacunes existent dans le cadre des institutions locales. Les procès-verbaux du conseil municipal montrent sans doute que les questions les plus importantes ont souvent été mises en délibération; mais toutes les attributions se trouvaient concentrées entre les mains de l’autorité communale. Or, supposez-la aussi éclairée, aussi bien intentionnée qu’il est possible, elle n’en était pas moins dans l’impuissance absolue d’embrasser des questions aussi complexes. On peut en pareil cas parler d’autant plus librement des résultats fâcheux qui se sont produits, qu’ils proviennent en général de la situation et non des volontés personnelles; mais il doit infailliblement arriver qu’on est alors poussé vers des solutions ou sommaires, ou trop lentes, ou arbitraires. Dans un milieu où les initiatives privées auraient le plus besoin d’être encouragées et soutenues, elles sont exposées à ne rencontrer qu’obstacles ou dédain. La preuve en apparaît clairement dans ce qui s’est passé à Saint-Nazaire pour des fondations concernant la marine, le commerce ou la cité elle-même.

Depuis combien de temps, par exemple, sans avoir pu aboutir à rien, ne parle-t-on pas de la création d’un entrepôt? On avait essayé d’en mettre la construction en adjudication il y a quelques années; mais le cahier des charges présentait des conditions inacceptables. Le caractère commercial de l’entreprise n’avait pas été bien saisi. Il est fort à désirer que les nivellemens qui s’opèrent aux abords du bassin permettent au moins une installation provisoire à défaut d’une installation définitive sur un autre point, qui serait de beaucoup préférable. Si les marchandises réclament un abri, les négocians auraient besoin d’un point de réunion, d’une sorte de bourse, dont il n’existe pas la moindre trace. Un commerçant expérimenté du pays y avait songé : il s’était adressé à la chambre de commerce de Nantes, qui nous semble s’être écartée cette fois dans sa réponse de la ligne qu’elle suit habituellement dans ses études. « Le commerce de Saint-Nazaire est nul, a-t-il été allégué; il ne s’y fait aucune transaction, aucun affrètement. Les négocians, si l’on entend par là ceux qui achètent de fortes parties de marchandises, n’y existent pas. » Paroles équivoques, car, en dehors du grand négoce, que la chambre avait en vue, il existe à Saint-Nazaire des maisons intéressées dans les affaires concer-