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une institution particulière qu’à une école publique. L’admission y est très recherchée, car, outre la gratuité complète du cours d’instruction, les élèves sont à peu près certains d’obtenir en sortant une bourse pour l’université; de plus les professeurs sont excellens, étant tous des gradués d’Oxford et de Cambridge; néanmoins les études sont loin d’être brillantes, parce que les jeunes enfans, au lieu d’être admis au concours, comme cela se passe en d’autres écoles, sont nommés par les administrateurs de la corporation, qui usent de cette faculté pour caser à tour de rôle leurs protégés. Nous devons signaler ici un trait caractéristique de l’organisation scolaire de la Grande-Bretagne : il-y a beaucoup de bourses, tant dans les écoles qu’aux universités; mais il ne faudrait pas s’imaginer qu’elles sont dévolues, comme en notre pays, à des enfans de familles besoigneuses. Ou bien elles sont distribuées par faveur, ou bien elles sont mises au concours; dans l’un et l’autre cas, les riches peuvent les obtenir aussi bien que les pauvres. Dès le jeune âge, l’enfant apprend à gagner de l’argent par son travail.

Les écoles de grammaire, dont on peut apprécier par ce qui précède l’esprit et les méthodes, sont nombreuses en Angleterre; plusieurs possèdent de riches dotations, et elles sont soutenues par l’influence toute-puissante de la tradition. On s’accorde cependant à dire qu’elles déclinent. Le programme des études ne répond plus aux besoins du jour, c’est leur grand vice. Il est même permis de croire que l’enseignement si obstinément classique qu’elles distribuent ne se serait pas maintenu jusqu’à ce jour, si cet enseignement avait été plus tôt mis en demeure de s’affirmer dans un examen final. De l’autre côté de la Manche, l’instruction secondaire n’a pas de sanction. Que l’élève ait parcouru le cercle complet des études ou qu’il soit sorti de l’école avant le temps, qu’il ait étudié la littérature grecque avec passion ou qu’il n’ait eu d’ardeur que pour le noble jeu du cricket, rien ne le constate. C’est un élève d’Eton, de Harrow, de Rugby ou de toute autre école de grammaire; voilà son seul titre. Il n’y a pas, comme en France, l’épreuve du baccalauréat. Les universités confèrent des grades, il est vrai; mais elles les réservent pour leurs étudians immatriculés, et n’admettent pas les étrangers à leurs luttes académiques[1].

Les Anglais s’étaient laissé dire jusqu’en ces derniers temps qu’il importe bien moins de meubler de souvenirs utiles la tête d’un

  1. Certains collèges d’Oxford et de Cambridge font passer un examen d’admission à l’étudiant qui se présente pour être immatriculé, mais c’est l’exception. Ceux qui ont une clientèle assurée agissent ainsi ; ceux qui n’ont pas la vogue acceptent au contraire tous les candidats sans épreuve préalable. En réalité, l’entrée aux universités anglaises n’est précédée d’aucun examen.