Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

forme dans le régime intérieur des principales écoles anglaises. Jusque-là les écoliers abusaient outre mesure, paraît-il, de la liberté d’allures qui leur était laissée. Turbulens et indisciplinés, les plus forts exerçaient leur tyrannie aux dépens des plus faibles, et les études se ressentaient sans doute de cet état d’indocilité. Plutôt que de soumettre les élèves au régime étroit d’un lycée français, Arnold entreprit de les réformer les uns par les autres. Professeur de la classe supérieure, de plus chapelain de l’établissement, il les fit rentrer dans le devoir par la persuasion et par la force de son caractère, il parvint à moraliser cette jeunesse turbulente sans avoir besoin d’autres intermédiaires que les plus grands de ses propres pupilles. Rugby n’est pas seulement aujourd’hui l’une des écoles où la discipline est le mieux réglée, les études y sont aussi sagement progressives. La littérature classique reste au premier rang; mais l’enseignement des mathématiques, de la physique, des langues vivantes et du dessin, quoique encore trop restreint, s’élargit de jour en jour. Il y existe un laboratoire et des cours de sciences naturelles qui sont obligatoires, grave infraction aux programmes des autres écoles.

Outre les trois grands établissemens d’Eton, Harrow et Rugby, dont il vient d’être question, il existe encore bon nombre d’institutions du même genre qui, faute d’avoir gagné la faveur des familles, sont restées au second rang par le nombre des élèves sinon par la force des études. Le chapitre de Westminster, dont le revenu territorial s’élève à 60,000 livres sterling, est obligé par ses statuts à entretenir 40 boursiers et 2 professeurs. C’est le noyau d’une école qui se cache à l’ombre de la vieille cathédrale. Soit que le séjour de Londres déplaise aux familles, soit que Westminster s’attache avec trop de persistance à l’enseignement suranné du moyen âge ou qu’on trouve la discipline intérieure de l’école trop rude, le nombre des élèves va sans cesse en diminuant. A Londres, les externats conviennent mieux aux habitudes de la population; les principales écoles n’ont pas d’élèves internes. Il en est ainsi, par exemple, de Saint-Paul. Au XVIe siècle, le Dr Colet, doyen de Saint-Paul et ami d’Érasme, fonda près de cette cathédrale une école libre dont les élèves devaient être au nombre de 153, en mémoire de la pêche miraculeuse des apôtres, et il en confia la gestion à la corporation des merciers. Les honorables membres de cette corporation se sont bien gardés de changer quoi que ce soit aux prescriptions du fondateur. Il y a encore 153 élèves, pas un de plus; seulement, comme la fondation consistait en terres et que le revenu s’en est prodigieusement accru, — il dépasse 200,000 francs, — les merciers ont la prétention de s’approprier l’excédant. Saint-Paul ressemble plus à