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LOUIS DE BERQUIN
— 1523-1529 —


I.

Louis de Berquin était gentilhomme, docteur en théologie et conseiller du roi. Le conseiller ne siégeait, il paraît, dans aucun conseil, le docteur n’occupait aucune chaire, et le gentilhomme ne fréquentait pas la cour. Né, dit-on, à Passy, près de Paris[1], Berquin appartenait toutefois à la noblesse picarde, comme ayant son domaine patrimonial près d’Abbeville, au territoire de Rambure ; mais il demeurait habituellement à Paris. Sa fortune était modeste ; sa terre ne lui rapportait pas au-delà de 500 livres par an. C’est pourquoi sans doute il ne s’était pas marié. En l’année 1523, François Ier régnant, un gentilhomme de trente-trois ans, — c’était l’âge de Berquin, qui avait choisi Paris pour son séjour ordinaire, — pouvait, sans compromettre son nom, mener une vie dissipée. On s’accorde pourtant à dire que ses mœurs étaient irréprochables. Erasme, qui a fait une enquête sur toute sa conduite, soit à Paris, soit ailleurs, déclare que jamais aucun soupçon d’incontinence ne s’éleva contre lui[2]. Cependant, puisque son nom appartient à l’histoire, il n’était pas sans passion ; il ne végétait pas tristement insensible, indolent, dans ce repos qui fait le bonheur des énervés ; il avait au contraire une passion, qui, développée par de favorables circonstances, occupe tout l’esprit et y entretient une agitation salutaire, la passion de l’étude. Avant l’année 1512, quand il avait à peine vingt-trois ans, Nicolas Berauld lui dédiait sa réponse aux invec-

  1. Journal d’un bourgeois de Paris, publié par M. Ludovic Lalanne, p. 378.
  2. Érasme, Epist. 1061.