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dérée. Le baron Louis fut nommé président de la commission chargée d’examiner les propositions du ministre. Les imprudences de la chambre de 1816 avaient compromis le crédit naissant, on prit des mesures pour le relever. Une des plus efficaces fut la constitution d’une caisse d’amortissement sérieusement dotée. Cette caisse fonctionna pendant toute la durée de la restauration, et en 1830 elle avait racheté pour plus de 50 millions de rentes. M. Calmon raconte avec détail tout ce qui se fit à cette époque mémorable pour constituer les finances. Les discussions de la chambre y eurent une grande part; elles éclairèrent toutes les questions et eurent pour effet d’arrêter l’aliénation commencée des forêts de l’état et des biens des communes. C’est là en effet une de ces extrémités que peut seule excuser la nécessité la plus absolue, et sous ce rapport l’administration du baron Louis n’avait pas été tout à fait irréprochable.

A la retraite du duc de Richelieu, le baron Louis redevint ministre des finances pour la troisième fois. Il appartenait au parti monarchique constitutionnel, qui voulait concilier le présent avec le passé, la charte avec la dynastie. La droite subissait impatiemment l’ascendant de son expérience et la rudesse qu’il mettait quelquefois dans ses rapports avec les personnes. Les grands embarras étaient passés; mais la constitution financière du nouveau gouvernement n’était pas encore terminée. Les chambres n’avaient pu jusqu’alors voter les impôts que par douzièmes provisoires. Le baron Louis voulut corriger cette irrégularité, il demanda que par exception le budget fût voté une première fois pour dix-huit mois, afin de rentrer ensuite dans l’ordre constitutionnel. La chambre des députés y consentit non sans peine; la chambre des pairs refusa. Le roi Louis XVIII, sur le conseil de ses ministres, créa d’un seul coup soixante nouveaux pairs pour changer la majorité. Cette mesure, dit M. Calmon, était un vrai coup d’état contre la chambre des pairs, de même que l’ordonnance du 5 septembre avait été un coup d’état contre la chambre des députés. Elle augmenta l’irritation du parti royaliste. Le baron Louis eut encore le temps de réaliser quelques améliorations; mais il était désormais moins nécessaire, quelques-unes de ses propositions furent rejetées ou modifiées. Après les élections de 1819, qui accrurent les forces de la gauche, le cabinet effrayé voulut réformer la loi des élections dans un sens favorable à la droite; le baron Louis et deux de ses collègues refusèrent de s’associer à cette mesure et donnèrent leur démission. Il sortit alors du ministère pour n’y plus rentrer qu’après la révolution de 1830.

La période intermédiaire entre la retraite du cabinet Desselles et le triomphe définitif de la droite dura deux ans. Le ministère des finances échut à M. Roy. Cet homme d’affaires consommé continua l’œuvre de ses prédécesseurs. Le principal acte de son administration fut un dégrèvement notable sur l’impôt foncier. Le produit des impôts croissait naturellement, tous les services étaient assurés, et il restait encore un