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mens de l’an dernier n’aient laissé au-delà des Alpes bien des irritations et des complications faites pour embarrasser la politique intérieure et encore plus la politique extérieure de l’Italie, restée depuis ce moment dans des dispositions assez équivoques vis-à-vis de la France ; mais en définitive il y a un certain bon sens public plus fort que toutes les excitations factices, et telle est même la tendance à l’apaisement que la guerre qui se poursuit au sein des chambres entre le gouvernement et l’opposition se dénoue périodiquement au profit du ministère. Depuis un mois que la session est ouverte, cette guerre a recommencé ; les partis ont essayé leurs forces à plusieurs reprises, et le ministère Ménabréa est resté debout, peut-être plus affermi que jamais. M. Rattazzi, avec toute sa tactique, avec toute son habileté à créer des embarras, M. Rattazzi a été vaincu. Ce n’est point décidément un grand homme que M, Rattazzi, et, s’il continue, sans cesser d’être un dangereux ennemi, il finira par n’être plus qu’un manœuvrier assez vulgaire, ne portant bonheur ni à l’opposition quand il en est le chef, ni au gouvernement quand il le dirige. Ce ne sont pas d’ailleurs de bien grosses batailles qui viennent d’être livrées dans le parlement italien, ce sont des escarmouches, qui auraient pu néanmoins conduire à de plus sérieux embarras, et qu’un peu de bon sens a su arrêter à propos.

La première question sur laquelle opposition et gouvernement se sont retrouvés en présence dans le parlement italien, c’est la réforme administrative, qui a presque autant d’importance que la question financière. 11 s’agissait de savoir s’il fallait commencer par la fin ou par le commencement ; en d’autres termes, l’opposition s’est efforcée de faire avorter les plans proposés par le dernier ministre de l’intérieur, M. Cadorna, soutenus par son successeur, M. Cantelli, et amendés par une commission parlementaire en présentant un contre-projet qui ne tendait à rien moins qu’à faire ajourner la réforme administrative jusqu’à la réorganisation complète des provinces et des communes. C’était refuser de remédier à un mal sous prétexte qu’on ne pouvait guérir tous les maux d’un seul coup, et écarter sommairement une première amélioration des plus utiles pour le plaisir de mettre le ministère en désarroi. M. Rattazzi, qui avait procédé de même en 1860, mais avec beaucoup plus de sans-façon, trouvait mauvais cette fois qu’on agît ainsi. Il n’est pas arrivé à persuader la chambre, qui a donné une assez forte majorité au gouvernement. Deux jours après, c’était une autre campagne infiniment plus grave qui pouvait de nouveau mettre le crédit en péril en compliquant les relations extérieures de l’Italie pour une affaire de foi publique. L’opposiiion, à propos du vote provisoire du budget, a imaginé de demander la suspension du paiement des intérêts de la dette pontificale transférée à l’Italie. La question, on le sait, a été réglée par des arrangemeus négociés sous les auspices de la France et découlant de la convention du 15 septembre 1864. L’opposition a cru sans doute que c’était un bon