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l’empereur venait d’être rompue. Sujets fidèles et respectueux, nous oserons néanmoins dire à votre majesté que, le saint-siège étant le lien le plus fort, le lien nécessaire à l’unité ecclésiastique dont il est le centre, nous ne pouvons plus prévoir que des jours de deuil et d’affliction pour l’église, si les communications et les rapports demeurent/ longtemps suspendus entre les fidèles et le père commun que Dieu leur a donné dans la personne de notre saint-père le pape[1]. »


Après ce préambule qui était de nature à déplaire quelque peu à l’empereur, les évêques de la commission, reprenant le système de ménagement et de flatterie déjà employé l’année précédente, se hâtaient, pour réparer cette hardiesse, d’ajouter immédiatement :


« Des circonstances impérieuses peuvent quelquefois obliger d’apporter certaines modifications à la juridiction du chef de l’église sans en altérer la substance. Seulement ces changemens, même dans la discipline, s’ils étaient annoncés trop précipitamment, seraient suspects au peuple, toujours léger et inconsidéré dans ses jugemens. Il leur semblait donc que les esprits devaient être préparés à toute variation, et qu’il fallait qu’ils y fussent doucement amenés. Quant aux questions qui leur avaient été posées, les évêques répondaient, pour la première question, que, si des circonstances malheureuses empêchaient temporairement de recourir au pape pour les dispenses, c’était aux évêques eux-mêmes qu’il faudrait s’adresser. La réponse à la deuxième question portait en substance que, le pape refusant les bulles sans alléguer aucune raison canonique de son refus, le moyen le plus sage à prendre serait de faire ajouter au concordat une clause par laquelle il serait établi que le pape devrait donner l’institution dans un temps déterminé, faute de quoi le droit d’instituer serait dévolu au concile de la province. Si le pape refusait d’acquiescer à cette modification du concordat, il n’y aurait rien de mieux à faire que de rétablir, pour ce qui concernait les évêques, les règlemens de la pragmatique sanction... Pour les rétablir légalement, la commission renouvelait la proposition déjà faite l’année précédente de convoquer un concile national ou une assemblée du clergé composée d’un certain nombre d’évêques pour chaque métropole. La commission souhaitait toutefois qu’avant de recourir à cette mesure on envoyât au pape une députation pour lui exposer les besoins de l’église de France et l’éclairer sur le véritable état des choses. Toutes les difficultés s’aplaniraient, disaient en terminant les évêques, si cette députation avait le succès dont nous osons nous flatter; mais si, contre toute espérance, ce dernier effort était inutile, les peuples, qui portent un œil inquiet sur nos délibérations, reconnaîtraient que nous n’avons rien négligé de ce

  1. Fragmens historiques de M. de Barral, p. 182.