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promesse solennelle de ne rien faire contre les quatre articles de 1682, qu’il retourne à Rome, qu’il vienne à Paris, qu’il choisisse un autre point de l’empire; cette liberté lui est donnée par le sénatus-consulte. Si saint Pierre revenait au monde, ce ne serait pas à Rome qu’il irait. Il a quitté Antioche, il a préféré Rome à Jérusalem parce que Rome était la première des capitales et le séjour des empereurs, comme l’est aujourd’hui Paris. Qu’il fasse d’ailleurs ce qu’il voudra avec les puissances étrangères, je ne m’en mêle pas. Il trouvera en Autriche les mêmes principes de liberté ou même de plus étendus; mais chaque puissance fait ce qui paraît mieux lui convenir... Ainsi, à l’égard des institutions canoniques, puisque le pape s’est obstiné à ne pas exécuter le concordat, je peux et je dois dans les circonstances actuelles y renoncer. Voilà, messieurs du chapitre, quels sont mes principes; faites-les connaître à vos curés. Ils sont tous à l’avantage de la religion, et je ne m’en écarterai jamais. »


En recevant cette réponse à leurs protestations de dévoûment, ces messieurs du chapitre durent comprendre un peu tardivement à quelle démarche inconsidérée ils s’étaient laissé entraîner, et quel parti l’empereur se proposait d’en tirer. L’adresse inspirée par le cardinal Maury n’avait pas en effet d’autre but que d’engager les personnages les plus considérables du clergé de Paris dans la querelle du chef de l’empire avec le chef de la religion catholique, et de donner à entendre au pape que tous les ecclésiastiques de l’empire français professaient les mêmes maximes. Afin d’en convaincre plus sûrement Pie VII, l’empereur, parfaitement satisfait des paroles que Maury avait su mettre dans la bouche des chanoines de sa cathédrale, n’eut rien de si pressé que de faire surgir de partout les plus chaleureuses adhésions aux doctrines émises par le chapitre métropolitain de Notre-Dame. Rien ne fut, à ce qu’il paraît, plus facile, et, le signal une fois donné, les adresses abondèrent à Paris. L’empereur trouva sans doute une satisfaction particulière et comme un régal de prince à mettre de préférence en évidence les manifestations gallicanes arrachées aux chapitres d’Italie, car tandis que les adresses françaises, froidement sollicitées, demeuraient obscurément ensevelies dans les cartons du ministère des cultes, toutes celles qui arrivaient de l’autre côté des Alpes recevaient au contraire la plus grande publicité. Les colonnes du Moniteur en furent littéralement encombrées presque chaque jour pendant des mois entiers. Au grand étonnement des-lecteurs parisiens, ces documens ecclésiastiques usurpaient tout à coup la place de faveur autrefois réservée aux bulletins de la grande armée. En réalité, ce n’était pas aux oisifs de la capitale qu’ils étaient destinés. L’empereur se souciait beaucoup moins de l’effet qu’ils produiraient à Paris