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viticoles et ceux qui bordent les côtes de l’Océan, se sont prononcés pour la liberté commerciale, ceux qui se croient menacés par L’importation se sont prononcés contre, les autres hésitent. Somme toute, le système protecteur recule sensiblement; il avait autrefois l’unanimité parmi les agriculteurs, il a peut-être encore la majorité numérique, mais il la perd tous les jours. Les anciennes illusions se dissipent peu à peu, et la cherté qui a suivi les mauvaises récoltes de 1866 et de 1867 n’a pas peu contribué à les détruire. Si l’enquête se faisait aujourd’hui, elle trouverait encore plus d’adhérens à la liberté commerciale; l’affirmation trop absolue du rapport n’a fait que devancer le temps.

Une grande majorité a déclaré approuver la suppression de l’échelle mobile. Le système des droits variables est bien fini, il n’a plus que de très rares partisans. C’est sur la quotité du droit fixe établi par la loi du 15 juin 1861 que la division s’est faite. Les uns ont approuvé le droit actuel de 50 centimes par quintal métrique de blé, les autres ont demandé que ce droit fût élevé. Parmi ceux-ci, les uns ont proposé 2 fr. 50 c, les autres 1 fr. 25 c. seulement. D’après ce que nous pouvons savoir des détails de l’enquête, il y a majorité dans le sens d’une élévation. Le commissaire-général dit le contraire; mais il ne parle que des résultats officiels. « Cinquante-six commissions départementales, dit-il, se sont prononcées pour le maintien du droit actuel; dans sept départemens, les avis, soit des commissions départementales, soit des diverses personnes entendues, ont été partagés ou douteux; dix commissions départementales ont formellement exprimé le vœu de voir rétablir un droit supérieur; les informations manquent encore pour onze départemens. » Pour quiconque sait quelle pression ont exercée la plupart des présidens, ces chiffres sont démonstratifs. On doit s’étonner que toutes les commissions départementales, choisies par les préfets, ne se soient pas prononcées dans le sens du gouvernement. Il a fallu au dehors une grande puissance d’opinion, car toute l’action de l’autorité s’est déployée pour forcer les témoignages sur cette pauvre petite question du droit fixe, comme s’il s’était agi du salut de l’empire.

Cette violence du gouvernement est d’autant plus étrange qu’il agissait contre son propre intérêt. Il voulait avant tout obtenir un mouvement d’opinion en faveur de la liberté commerciale, et il l’aurait eu bien plus sûrement, s’il avait cédé sur ce point de détail. L’élévation du droit fixe à 1 fr. 25 c. par quintal métrique n’a aucune importance au point de vue protecteur, le commissaire-général en convient. « Il est absolument impossible, dit-il, d’admettre que le supplément de droit perçu sur quelques milliers