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loi fixe la valeur courante de l’or et de l’argent, la monnaie de compte est représentée non par une quantité donnée d’or ou par une quantité donnée d’argent, mais par une raison composée, 1° du rapport établi par la loi entre la valeur de l’or et celle de l’argent, 2° de celui fixé par le commerce, 3° de la proportion pour laquelle les monnaies d’or et d’argent entrent dans la circulation. »

Ce fut l’opinion de M. Gaudin qui prévalut. On décida qu’on frapperait des pièces d’or ayant une valeur nominale déterminée, mais on ne s’expliqua point avec précision sur la question du changement de poids et de titre en cas de variation des deux métaux. Quoi qu’il en soit, si l’esprit de la loi de germinal était favorable à l’étalon d’argent, il ne put résister à la force des choses. La seule fabrication des pièces d’or d’une valeur déterminée suffit pour leur donner un cours légal comme à l’argent, on les offrit en paiement, et personne ne put les refuser; il y a plus, les offres réelles, même faites en or, en cas de litige, furent toujours sanctionnées par les tribunaux. Par conséquent il ne peut pas y avoir de doute sur la légalité de la monnaie d’or. Non-seulement c’est une question vidée par la jurisprudence, mais c’est aussi une question d’équité. Il est bien évident qu’à moins de stipulations contraires, et nous ne savons pas jusqu’à quel point elles seraient admises par les tribunaux, tous les contrats depuis longtemps ont été faits en vue du paiement en or ou en argent laissé au choix du débiteur, et comme celui-ci choisit toujours le métal le plus déprécié, on a accepté d’avance les mauvaises chances du double étalon. L’état est donc parfaitement libre de faire ce qu’il jugera préférable, il peut démonétiser l’argent sans craindre de violer des droits acquis. Ceci dit, nous passons à la question de fond.

Parmi les avantages que l’on attribue au double étalon se trouve celui de rendre les relations commerciales plus faciles avec les pays qui ont l’une ou l’autre des deux monnaies. S’il s’agit d’un pays qui ait l’étalon d’argent, nous trouvons dans notre stock métallique de quoi régler avec lui. De même s’il faut régler en or. Nous avons donc un double avantage qui n’appartient pas aux pays qui n’ont qu’un étalon. Quand il a été question pour la première fois de démonétiser l’argent, on nous a opposé notamment nos rapports avec la Hollande, avec l’Allemagne, et on nous a dit que nous rendrions ces rapports beaucoup plus difficiles. Les personnes qui font l’objection ne se rendent pas bien compte de l’état des choses. Elles se figurent que, parce que nous avons les deux métaux comme monnaie légale, ils sont toujours l’un et l’autre à notre disposition, et que, si des remises un peu importantes en argent par exemple étaient à faire en Hollande ou en Allemagne, nous en trouverions aisément