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arrangement serait facilité, au point de vue topographique, par l’état si compacte et si homogène des marais de la rive droite de la Loire. Sur la rive gauche même, il ne serait point irréalisable. Une nécessité pressante doit triompher ici de l’esprit d’inertie ou des répugnances des propriétaires. Les objections faites à ce projet ne sont pas sérieuses. Les uns expriment la crainte de se voir dépouiller ainsi de la libre disposition de leurs biens. Il est à peine besoin de montrer combien cette appréhension est chimérique, car chacun garderait la faculté d’en transmettre à son gré la propriété, et aurait un droit proportionnel sur les produits; on n’aliénerait que l’impuissance d’une exploitation isolée. D’autres redoutent l’immixtion administrative, qui serait certainement très fâcheuse, mais qu’il est bien facile d’éviter. Un pareil syndicat, constitué par les parties intéressées, ne relèverait que d’elles-mêmes. On peut relater cent exemples d’institutions analogues, fondées pour le dessèchement de marécages, pour la construction d’écluses, de canaux d’irrigation, et qui ont conservé une parfaite indépendance. L’association profiterait aux paludiers aussi bien qu’aux propriétaires. C’est à l’avantage des uns et des autres que le syndicat pourrait mieux répartir le travail en confiant aux mêmes mains les marais contigus, mieux calculer la production en consultant les besoins de la consommation, rendre la vente plus fructueuse en choisissant mieux le moment de l’effectuer. Enfin un syndicat se trouverait dans une bien meilleure position que chacun des propriétaires pour traiter des conditions du transport avec les compagnies de chemins de fer, pour lutter contre la concurrence des salines de l’est, pour former auprès du gouvernement tous les vœux qui relèvent de sa compétence immédiate. Si des syndicats étaient installés pour la gestion des différens groupes, ce système appellerait une mesure complémentaire. On pourrait créer pour tout l’ouest un comité supérieur purement consultatif où siègerait un délégué de chaque syndicat. Destiné à discuter les questions intéressant l’ensemble des marais salans, ce comité pourrait se rassembler une ou deux fois par année en fixant lui-même le lieu de ses réunions, qu’il choisirait alternativement dans chaque groupe. L’industrie salicole de l’ouest serait ainsi constituée pour la défense et pour l’action. Le public n’aurait qu’à y gagner, car la concurrence entre les divers centres producteurs deviendrait plus sérieuse.

De son côté, sans empiéter sur le domaine de l’initiative privée, le gouvernement possède des moyens de réagir sûrement contre les causes de la détresse. Parmi les mesures qu’on attend de lui, il y a d’abord celles qui touchent l’impôt; nous examinerons ce point à part. Il y a d’autres remèdes encore pour l’application des-