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merce d’art local pour lesquels certaines cités italiennes gardent encore leur renommée.

La Grèce, cette institutrice des nations latines et du monde moderne dans le domaine de l’art et de la science, cette terre classique du beau, qui y fut l’objet d’une sorte de culte, la Grèce, dont on ne peut regarder sans étonnement et admiration les monumens mutilés, ruinés par les Romains, qui emmenèrent dans leur Babylone un peuple d’esclaves et de statues, par les Vénitiens et les Turcs, qui renversèrent ce qu’avaient laissé les barbares et les destructeurs d’images, par les Anglais, dont le zèle acheva l’œuvre commencée, — la Grèce, il faut le dire, ne fait que peu de chose pour organiser chez elle l’enseignement populaire de l’art. Cependant elle dépense beaucoup en proportion de ses forces pour l’instruction. Elle est ambitieuse d’apprendre, de reprendre son rang, et il ne faut pas désespérer d’elle. Qui sait si ce petit pays ne retrouvera pas encore une fois un art nouveau, heureux, doux et humain, comparable à celui qu’elle a jadis révélé au monde ?

L’enseignement du dessin est développé en Suisse, il entre sans y être obligatoire dans les élémens d’une instruction primaire, les instituteurs en prennent quelque souci, et n’attendent pas que les programmes leur en imposent l’obligation pour le comprendre dans les premiers exercices des enfans. Seulement il en est quelques-uns qui font nettement fausse route, et qui, pour épargner à leurs élèves les difficultés qui résultent de la complication des détails, arrivent, par un esprit de déduction logique un peu excessif, à leur faire dessiner de pures abstractions. Sous prétexte de réduire les modèles élémentaires à la plus simple expression, ils les dépouillent de tout ce qui peut les rendre suffisamment caractéristiques. Nous i ; ous rappelons encore certaine figure de meuble de l’exposition de 1867 exprimée seulement par quelques lignes brisées. Tout aurait été bien, si les lignes eussent évoqué dans l’imagination l’idée du meuble dont il s’agissait ; mais il fallait un sérieux effort de réflexion pour comprendre de quelle chose on avait voulu présenter l’image. De même pour des anses, des vases, des ornemens. Les modèles de têtes étaient meilleurs sans être excellens. Ce que nous avons vu de mieux, ce sont les petits dessins d’arrangement géométrique que l’on fait exécuter aux enfans dans les salles d’asile à l’aide de papiers de couleur découpés comme des rubans, puis tressés, plies, mis en œuvre de mille façons pour former de petites mosaïques sans prétention, fort propres à occuper à la fois l’intelligence naissante et la main des enfans. N’oublions pas que la Suisse a depuis longtemps introduit dans la disposition de ses écoles ces jardins f[u’on a nommés, du nom des petits êtres qu’on y élève.