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posaient l’armée de 50,000 hommes qu’il devait commander[1]. Les Bavarois, forts de 50,000 hommes et de 136 canons, sous le prince Charles de Bavière, étaient réunis sur le Mein entre Bamberg et Schweinfurt. Ils y restèrent à peu près immobiles jusqu’à la fin de juin; à cette époque seulement, ils parurent vouloir faire un effort sérieux pour rejoindre le 8e corps. Falkenstein se trouvait libre alors, concentré de l’autre côté de la forêt de Thuringe, entre Gotha et Eisenach. Avec les divisions Gœben et Manteuffel, le contingent de Saxe-Cobourg-Gotha et divers corps combinés, sa petite armée s’élevait tout au plus à 53,000 hommes avec 96 canons. Il allait donc avoir à lutter contre deux armées dont chacune était égale en nombre à la sienne ; mais elles avaient un armement inférieur, manquaient de cohésion et de direction. Braves sans doute, mais retenues par leurs gouvernemens, qui tergiversaient, redoutaient les grands risques, s’effrayaient déjà du progrès de l’ennemi et ne cherchaient bientôt plus que la paix, tout en craignant qu’elle ne fût désastreuse. Ajoutez que ces deux corps étaient séparés par un pays montagneux qui devait fournir à un chef résolu, servi par des troupes rapides, des ressources considérables. On ne peut entrer ici dans le détail de cette campagne, qui fit le plus grand honneur au général Falkenstein, et montra que ses soldats étaient capables non-seulement d’un effort d’enthousiasme, mais aussi de mouvemens prolongés et de marches fatigantes sur un sol difficile. L’indication des résultats obtenus par lui fera comprendre les avantages qu’il sut tirer aussi bien des lieux mêmes que de l’état moral et de la situation matérielle de ses adversaires.

Le 1er juillet, Falkenstein se trouva en mesure de reprendre l’offensive. Il voulait empêcher la jonction des deux armées; son plan était de s’introduire entre elles comme un coin et de les battre isolément. Il partit d’Eisenach et se dirigea sur Francfort par la route de Fulde; mais l’armée bavaroise, en s’avançant sur Meiningen, le força d’appuyer de ce côté. La division Gœben couvrait son flanc gauche; le 4, elle rencontra les Bavarois et leur livra autour de Dermbach, sur la route de Meiningen à Eisenach, une série de combats sanglans. Elle emporta les positions des Bavarois mais ceux-ci revinrent à la charge avec des forces très supérieures. Gœben ne voulut pas engager une lutte trop inégale, et il se replia dans la nuit. Les Bavarois s’attribuèrent la victoire; toutefois, renonçant à gagner Francfort par ce chemin, ils se retirèrent du côté du

  1. Le 8e corps était composé ainsi : 14,000 Wurtembergeois, 12,000 Badois, 10,000 Hessois (Darmstadt), 9,000 Hessois (Cassel), 5,000 Nassoviens, 12,000 Autrichiens ; mais le contingent de la Hesse électorale n’agit point, et il ne resta ainsi qu’un peu plus de 50,000 hommes.