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venir. L’empereur de Russie s’était adressé déjà personnellement aux souverains de Prusse et d’Autriche; il accueillit l’offre de la France de s’entendre avec l’Angleterre pour proposer une conférence où seraient débattues les questions en litige. Le 24 mai, des notes identiques contenant l’invitation à la conférence furent remises par les représentans des trois puissances à Vienne, Berlin, Francfort et Florence. L’Italie et la Prusse y adhérèrent le 29. La diète annonça le 1er juin qu’elle s’y ferait représenter par M. de Pfordten, sous la réserve toutefois que la question du Holstein et celle de la réforme, considérées toujours comme purement allemandes, garderaient ce caractère dans la réunion projetée. Quant à l’Autriche, elle soumit son adhésion à la stipulation préalable qu’on exclurait des délibérations communes toute combinaison qui tendrait à donner à un des états convoqués un agrandissement territorial ou un accroissement de puissance. C’était se prononcer d’avance contre l’annexion de tout ou partie des duchés à la Prusse et écarter du même coup la question vénitienne. Dans ces conditions, la conférence devenait inutile. Le Moniteur français annonça le 7 juin que les négociations étaient rompues. Ainsi avortait cet effort tardif de la diplomatie. Les événemens d’ailleurs s’étaient précipités dans l’intervalle, et avaient rendu désormais impossible toute tentative de conciliation.

Le 1er juin, l’envoyé autrichien déclarait à la diète que le gouvernement impérial consentirait à désarmer vis-à-vis de la Prusse dès qu’il aurait obtenu des garanties contre le retour des dangers de la guerre en Allemagne, que ces garanties étaient subordonnées au règlement de la question du Slesvig-Holstein, et que, les négociations engagées à cet égard avec la Prusse n’ayant pas abouti, l’Autriche déférait ce règlement à la diète, et appelait en même temps les états du Holstein à faire connaître leur sentiment. Ainsi M. de Bismarck en était venu à ses fins. Par la motion de réforme, il avait sinon gagné pour lui, du moins aliéné décidément à l’Autriche toute la démocratie; par ses arguties sur les armemens que l’attitude de l’Italie avait rendues si à propos spécieuses, il avait poussé à bout la cour de Vienne, et l’avait amenée enfin à une démarche doublement compromettante : refuser le désarmement simultané et rompre de fait les engagemens de Gastein. Il en prit acte dans une circulaire qu’il adressa le à juin aux agens prussiens à l’étranger. Le général Manteuffel, gouverneur du Slesvig, eut ordre de sauvegarder les droits de la Prusse dans les deux duchés conformément au traité de Vienne, et il entra en conséquence dans le Holstein (8 juin). Il avait environ 15,000 hommes, auxquels s’ajoutèrent 7,000 hommes venus par Hambourg; il était appuyé de plus par