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mal, disait-il, avec la déclaration de neutralité. Le cabinet chilien répondit en termes courtois. Il protesta de son désir sincère de conserver la paix. Il restait impuissant à empêcher toutes les manifestations de l’effervescence populaire; jusqu’à un certain point même, il était contraint de paraître s’y associer. Le temps et la prudence calmeraient mieux que des tentatives dangereuses de répression des exagérations et des craintes irréfléchies auxquelles la modération de l’Espagne ne donnerait sans doute pas de nouvel aliment. — Après que la paix eut été signée avec le président du Pérou, l’Espagne insista pour obtenir le désaveu officiel des actes qu’elle reprochait au Chili. — La reine a été injuriée dans vos journaux, disait le représentant de l’Espagne. — Nous le déplorons plus que vous, répondait le ministre chilien, M. Covarrubias, mais que faire? Notre presse est libre et assurée de l’impunité. — Des rassemblemens ont insulté le drapeau de l’Espagne à Santiago devant l’hôtel de la légation, la police n’a pas agi. — Elle a fait ce qu’elle a pu, affirmait le Chili; elle a réussi du moins à empêcher tout acte de violence. — Vous avez autorisé le départ des volontaires. — Pouvions-nous les arrêter dans l’état où se trouvaient les esprits sans nous exposer à des désordres intérieurs dont vous-mêmes eussiez été victimes. — Pourquoi refuser aux bâtimens espagnols le charbon de terre que vous laissiez prendre à l’escadre française, qui est en guerre avec le Mexique. — Mais, soutenait M. Covarrabias, la France n’est pas en guerre avec le gouvernement du Mexique (c’était alors l’empire), aucun port mexicain ne se trouve en état de blocus. Entre l’Espagne et le Pérou, l’état de guerre est flagrant. Le congrès péruvien l’a proclamé (ceci n’était pas absolument exact). Laissez-nous faire, n’exigez pas de nous plus que nous ne pouvons vous accorder pour le moment. Nous attachons un grand prix à l’amitié de l’Espagne, nous n’oublions pas les liens qui nous unissent à elle; mais nous ne saurions nous montrer moins jaloux de maintenir l’accord qui doit exister entre le gouvernement et le pays, ni nous engager à des concessions sans motifs que la nation répudierait. Notre entier bon vouloir, c’est ce que nous promettons; vous connaissez assez nos habitudes pacifiques pour ne pas manifester des exigences qui ne feraient que rendre plus dangereuse l’excitation que nous nous efforçons de combattre.

Néanmoins le gouvernement chilien ne se refusait pas à reconnaître que parmi les griefs articulés contre lui plusieurs méritaient en effet quelques réparations. On ne lui demandait aucune satisfaction qui lût de nature à causer un dommage matériel au pays. Il se décida donc à fournir dans la forme officielle les explications conci-