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identique au dogme indien du Brahmâ créateur, ils poussèrent la théorie jusqu’à concevoir le principe absolu et neutre qu’ils désignèrent par l’épithète d’inactif, akarana.

Lors donc que nous attribuons à la race aryenne et principalement aux Indiens et aux Iraniens la découverte de la théorie métaphysique, base unique de la religion, nous n’excluons aucun des autres peuples de la même race, et nous ne négligeons pas non plus les hommes des races inférieures; mais les faits démontrent que cette théorie n’a été complète que chez les deux grandes nations de l’Asie, parce qu’elles seules n’ont pas reculé devant les conséquences de la méthode. Les peuples des autres races, après être entrés aussi dans la même voie, ne s’y sont avancés que jusqu’où leurs aptitudes physiques et intellectuelles leur ont permis d’aller. Les uns s’y sont arrêtés dès le premier pas. Les autres ont commencé le travail de généralisation et compris qu’une grande puissance suffirait pour expliquer l’univers; cependant, ne pouvant concevoir les notions métaphysiques dégagées de toute figure sensible, ils ont fait leur dieu à leur image et l’ont revêtu d’une majesté royale agrandie, mais tout humaine. Au fond, la méthode que les peuples ont suivie et qu’ils suivent encore dans leurs conceptions religieuses est la même pour tous : il n’y a de différence que dans le degré. Ces différences dans l’application qu’ils font d’une méthode commune proviennent de leur constitution physique et morale, et donnent la mesure de leur intelligence.

Beaucoup de personnes admettent aujourd’hui que, prise dans son ensemble, la race aryenne est née la dernière, quelle que soit d’ailleurs la manière dont elle est née, et qu’elle avait été précédée de races inférieures dont plusieurs peut-être ont disparu. Il est certain par exemple que l’Inde était peuplée par des hommes de couleur lors de l’arrivée des Aryas dans ce pays, et que de même, quand les Aryas se présentèrent dans l’Occident, l’Europe était depuis longtemps habitée. Si les Celtes sont Aryas, les Basques et les Ibères ne le sont pas; ceux qui ont dressé les antiques pierres sépulcrales de la Bretagne, de l’Afrique et d’autres contrées, ne semblent pas non plus l’avoir été. Jadis aussi les missionnaires bouddhistes de Samarkande sont allés jusque dans le Nouveau-Monde et se sont établis probablement au Mexique; mais ces représentans de la race aryenne n’ont certes pas mêlé beaucoup de leur sang à celui des sauvages habitans de ces contrées. Il n’est pas admissible au point de vue de la science que les hommes de ce qu’on appelle l’âge de pierre fussent de la même race que les Indiens, les Perses et les Hellènes. Or il est constant que toutes ces populations plus ou moins anciennes ont eu des ébauches de religion, et