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La houille est l’auxiliaire indispensable de l’industrie du fer. Or depuis quelque temps l’opinion se répand que les gisemens houil1ers tendent à s’épuiser, et qu’on peut, pour beaucoup d’entre eux, prévoir le terme où l’exploitation en deviendra impossible. L’Angleterre, prétend-on, n’en aurait plus que pour deux cents ans. La France serait encore moins bien pourvue ; notre gisement le plus productif, celui du bassin de Saint-Étienne et de Rive-de-Gier, ne pourrait guère aller au-delà d’un siècle. Bien que notre génération n’ait pas à craindre pour elle-même le manque de charbon, il y a là, on le conçoit, un état de choses qui mérite les plus sérieuses réflexions, et l’on doit regarder comme éminemment utiles tous les procédés qui permettent de tirer un meilleur parti des produits houillers. À ce titre, — et sans parler des tentatives que l’on fait pour substituer à la houille d’autres combustibles, comme le pétrole, — il faut placer au premier rang l’industrie récente des agglomérés, qui consiste à former des briquettes avec le charbon menu. Cette poussière de houille était à peu près sans emploi ; on ne pouvait la brûler dans les foyers des machines. En la mélangeant avec du goudron de gaz, on en forme maintenant un combustible très compacte qui s’emploie sous forme de boules ou de petits pains quadrangulaires ; chacun a pu en voir d’immenses approvisionnemens le long des voies ferrées. La France et la Belgique en ont produit l’an dernier plus d’un million de tonnes.

Les industries textiles et la production des matières premières qui servent à fabriquer les tissus forment une partie considérable du travail humain. De ces matières premières, la plus importante est le coton. On sait la crise qu’a subie l’industrie cotonnière par suite de la guerre d’Amérique. Sur 900 millions de kilogrammes que l’Europe consommait en 1861, 750 millions environ venaient des États-Unis. Cette ressource manqua subitement, et il y eut comme une famine de coton. On put voir alors un exemple mémorable de la solidarité qui unit les nations modernes et du retentissement qu’un grand fait industriel a maintenant dans les parties du monde les plus éloignées les unes des autres. Toutes les contrées qui cultivaient déjà le coton se mirent tout de suite à accroître leur production dans une forte mesure. En deux ans, l’Inde passa de 80 millions de kilogrammes à 250, l’Égypte de 25 à 80, le Brésil de 7 à 27. On planta du coton dans une foule de pays où cette culture avait été à peine essayée. Les Antilles, le Pérou, l’Algérie, la partie méridionale de l’Italie, l’île de Malte, la Grèce, l’Asie-Mineure, la Perse, la Cochinchine, l’Australie, fournirent leur contingent. On a même vu des essais de culture cotonnière en France, dans les dunes qui sont près de Montpellier. La guerre d’Amérique a pris fin, mais