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la peine qu’on ne décourage pas ceux qui l’entreprennent. Tout récemment un nouveau régime administratif vient d’être inauguré dans l’empire, et à cette occasion le ministre de l’intérieur, M. Giskra, a adressé à tous les fonctionnaires une circulaire qui à elle seule est la preuve de la révolution accomplie en Autriche. Il secoue l’inertie et les habitudes surannées de la bureaucratie autrichienne ; il recommande aux employés d’être faciles, coulans, prompts dans l’exécution des affaires. « Le fonctionnaire, dit-il, ne doit jamais croire qu’il sauvegarde son autorité par l’exclusivisme ou le formalisme, ou en créant des difficultés. » Que veut dire ceci ? sommes-nous dans l’empire autrichien, sommes-nous ailleurs ? Il faut souhaiter pour l’Autriche que les circulaires aient chez elle un meilleur résultat que dans d’autres pays.

L’Autriche a gagné la liberté en perdant des batailles, en voyant tomber sa domination en Italie, et l’Italie de son côté, l’Italie émancipée, constituée, et libre, n’est point pour cela à l’abri de tous les embarras. Elle a la vie laborieuse, compliquée, de tous les pays libres. La session parlementaire, il est vrai, s’est terminée sans encombre, sans laisser de difficultés sérieuses ; mais voici que déjà un certain nombre d’incidens, de symptômes, se succèdent et se groupent, comme pour attester le travail permanent des partis. Il ne faut rien grossir sans doute, il ne faut pas voir partout des agitations et des menaces. Parce que Garibaldi a donné récemment sa démission de député, cela ne veut pas dire qu’il ait voulu reconquérir sa liberté pour se remettre en campagne et aller prendre le commandement de cette étrange affiliation qui s’est formée sous le nom de vengeurs de Mentana. Cette démission n’a pas moins suffi pour faire voir à certaines imaginations effarées une nouvelle armée de volontaires défilant vers Rome. Au fond, que Garibaldi ait cédé à la lassitude ou à un mouvement d’humeur contre les allures de l’opposition dans le parlement, la question de Rome reste la même ; elle est assurément une difficulté sérieuse, irritante, entre la France et l’Italie, elle n’est point un embarras du moment.

Elle ne s’est nullement aggravée depuis quelques jours ou du moins elle n’a pas pris un caractère plus aigu, et pour tout dire, si le gouvernement français hésite encore à rappeler son armée de Rome, ce n’est pas qu’il élève la prétention de rester indéfiniment dans les états pontificaux et qu’il ne se sentît même fort soulagé le jour où il serait délivré de cet embarras, c’est peut-être tout simplement parce qu’il s’arrête devant les obscurités d’une situation générale, et c’est là tout ce qu’il y a de vrai dans les bruits de négociations récentes au sujet de Rome ; mais en dehors de ces rumeurs un peu vagues, il y a aujourd’hui en Italie un fait qui pourrait avoir sa gravité. Le parlement de Florence a pris son congé, et voilà que dans ; l’intervalle il va se réunir à Naples une ombre de chambre, un parlement au petit pied, qu’on appelle déjà le parlamentino. C’est la gauche naturellement qui, battue dans le parlement