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négocia encore deux autres emprunts, dont les titres, remboursables en trois années et en papier, prirent les noms de 7-30 et 7-3-10, d’après le taux d’intérêt qu’ils portaient. Nous ne citons que pour mémoire une foule d’emprunts moins considérables et à très courte échéance. Ils furent successivement rachetés au moyen d’obligations des emprunts précédens, dont le gouvernement conservait toujours une fraction notable en réserve.

Il y a lieu de remarquer en effet que le congrès, quand il autorisait un emprunt, se contentait d’indiquer le chiffre maximum de l’émission. Le pouvoir exécutif pouvait ensuite choisir son moment pour négocier tout ou partie des titres ainsi créés. L’éminent homme d’état à qui le président Lincoln avait, dans ces jours difficiles, confié le département des finances, M. Mac-Cullogh, décidait de l’opportunité de chacune de ces émissions partielles. Il assumait ainsi une responsabilité singulièrement aggravée par les fluctuations continuelles de la valeur des titres ; mais le secrétaire du trésor avait besoin à cet égard, et pour plusieurs motifs, d’une certaine liberté d’allures. D’abord, grâce à cette combinaison, il était, nous l’avons vu, en mesure d’éteindre sans retard les nombreux petits emprunts à court terme auxquels on se trouvait réduit. En second lieu, comme une partie de l’intérêt de la dette était payable en or, il importait, au moment des paiemens, que la prime sur l’or ne fût pas trop élevée. Quand le taux de cette primo eût rendu le versement en numéraire trop onéreux, les titres non négociés que M. Mac-Cullogh. avait entre les mains lui fournissaient un moyen commode de se procurer des métaux précieux à un prix raisonnable. Il n’avait qu’à jeter sur le marché une fraction d’emprunt. L’agio baissait, et le trésor opérait ses paiemens en monnaie métallique dans des conditions moins désavantageuses. Ces opérations constituaient au budget des recettes un chapitre qui n’était pas sans importance.

Cette latitude laissée au pouvoir exécutif pourrait sembler peu compatible avec l’esprit de contrôle qui est la base des institutions américaines ; mais la simplicité du budget, l’abondance des renseignemens publiés par le gouvernement, la vigilance de l’opinion publique, rendaient aisée et efficace la surveillance que les chambres et le pays exerçaient sur l’administration des finances nationales. Le budget américain se solde par doit et avoir, ni plus ni moins que celui d’un simple particulier, la clarté n’en est altérée par aucune de ces divisions et subdivisions compliquées qui rendent les nôtres si longs et si difficiles à débrouiller ; tout le monde peut le lire et le comprendre sans effort. Le pouvoir exécutif est obligé de faire connaître chaque jour le chiffre des rentrées effectuées, de publier chaque mois l’état des dépenses, des recettes et de l’encaisse. Il n’y a donc point à craindre que l’opinion puisse jamais s’égarer sur la valeur des opérations faites pour le compte du