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comparable avec ce qu’elle est aujourd’hui, que la ville n’avait ni la même étendue, ni les mêmes ressources, ni les mêmes besoins. Les grandes dépenses concernant les monumens étaient payées entièrement sur les fonds de l’état. La population de Paris était trois fois moindre, les intérêts de la voirie et de la circulation n’exigeaient que des crédits assez minimes. Il n’y a donc point la moindre analogie à établir entre les deux époques. Ajouterons-nous qu’un emprunt de 8 millions fait à la caisse d’amortissement en 1808 et remboursable en seize annuités était alors une grosse affaire, et que, devant un excédant de dépenses de 2 ou 3 millions pour les années 1811 et 1812, le conseil municipal prenait une délibération désespérée, dans laquelle il évoquait « le gouffre du déficit ! » Voilà où en était le crédit. — Ce qui caractérise surtout la période à laquelle demeure attaché le nom de Frochot dans l’histoire de l’édilité parisienne, c’est la réorganisation ou la création des principaux services, instruction publique, hôpitaux, marchés, abattoirs, prisons, et ce qui rehausse le mérite de ces réformes, c’est précisément l’exiguïté des ressources à l’aide desquelles elles furent commencées. L’exposé de ces mesures tient une grande place dans le travail auquel s’est livré M. L. Passy sur l’administration du département de la Seine et de la ville de Paris. On y retrouve le germe des institutions qui se sont développées sous les yeux des générations suivantes. Tout en reconnaissant l’intérêt que présente cette étude, nous préférons insister sur le caractère politique de l’administration municipale sous le consulat et sous l’empire.

Pendant la république, les conseillers municipaux et même la plus grande partie des fonctionnaires procédaient de l’élection, À ce système, le consulat substitua la nomination directe par le pouvoir exécutif. Pour Paris, le conseil-général, qui se composait de vingt-quatre membres nommés par le premier consul, remplissait les fonctions de conseil municipal. Les maires et les adjoints étaient conservés dans les douze circonscriptions, mais leurs attributions se bornaient à la tenue des registres de l’état civil et à la direction des bureaux de bienfaisance. Le préfet de la Seine et le. préfet de police étaient placés au sommet de cette hiérarchie, qui fut maintenue sous l’empire. Ainsi, pour la constitution de son régime municipal, Paris était dans le droit commun : tous les agens étaient nommés par le gouvernement ; l’élection n’existait plus nulle part.

Toutefois, en substituant la nomination directe par le gouvernement à l’élection populaire, le consulat n’entendait point subordonner les conseils-généraux aux délégués du pouvoir exécutif. On était trop près de 1789 pour concevoir une pareille idée. Voici au surplus quelle était sur ce point l’opinion du premier consul,