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l’occasion de rechercher et de réunir tous les renseignemens propres à identifier ces deux noms. Il était arrivé, me disait-il, à la certitude ; il me promettait de me la faire partager, et il comptait sur moi pour la communiquer au public. Il voulait bien ajouter que mon travail aiderait le sien. Il s’établit entre nous quelque liaison. Je le vis chez lui. C’était un intérieur intéressant. M. Parkes avait épousé la fille de Priestley ; à plus d’un titre, il s’honorait de cette union, et je soupçonne que sur plus d’un sujet il partageait les opinions du célèbre docteur. Chez lui, la conversation était instructive et agréable, mais il la ramenait constamment sur Francis ; c’était son idée fixe. Il y avait consacré beaucoup de temps, de travail, de dépenses. En parlant sans cesse du résultat. de ses peines, il me l’annonçait plus qu’il ne me le faisait connaître. Il devait me montrer des pièces décisives, mais il ne me les montrait pas. Il se contentait de m’en indiquer le sens d’une manière un peu confuse et de me renvoyer au travail qu’il allait finir, mais que, disait-on, il ne finirait jamais. Dans d’autres voyages en Angleterre, je le revis. Il m’avait écrit dans l’intervalle. Toujours aussi zélé pour son œuvre, aussi bienveillant pour moi, néanmoins toujours aussi vague dans ses promesses, et peut-être plus propre à étudier qu’à produire. Je pus conjecturer dès lors que cet esprit curieux, subtil, laborieux, préférerait la recherche à la composition, et qu’indéfiniment amusé du plaisir de poursuivre son enquête jusque dans ses moindres détours, il pourrait bien ne jamais la clore, et négliger le but pour le voyage.

Peut-être me permettra-t-on de faire connaître avec quelle minutieuse conscience il entendait et exécutait le travail qu’il avait entrepris, en citant quelques fragmens des lettres qu’il voulut bien m’écrire pour m’associer en quelque sorte à son œuvre.


« Londres, 17 Wimpole-street, 13 octobre 1858.

« Mon cher monsieur, si je n’ai pas eu le plaisir de vous rencontrer à la table de déjeuner de notre mutuel et vieil ami M. Ellice, j’aurais dû cependant profiter de la liberté de la république des lettres et réclamer votre secours pour une simple question relative au mystère de Junius, et sur laquelle vous pouvez être en mesure de jeter quelque lumière. Votre dissertation capitale sur ce sujet n’ajoute rien, je crois, à ce qui se pourrait découvrir sur le point de savoir si et quand l’auteur de Junius a personnellement été témoin de la combustion publique des livres des jésuites à Paris vers ou plutôt avant le mois d’avril 1768.

Vous connaissez nécessairement ce passage auquel je fais allusion ; c’est, dans les lettres diverses (miscellaneous) attribuées à Junius, celle, qui porte la signature de Bifrons. J’ai reconnu et trouvé que Bifrons