Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/210

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans les villages, quand ces expositions sont désirées et patronnées par quelques personnes. Aujourd’hui des expositions spéciales très abondamment pourvues d’objets d’art peuvent être organisées partout. Ces expositions ambulantes, préparées avec soin et modifiées en raison des tendances, des aptitudes très diverses des pays auxquels elles sont destinées, produiront des résultats difficiles à calculer. Sans vouloir exagérer en effet la puissance de l’éducation par les yeux, sans ajouter une foi absolue aux merveilleuses légendes helléniques sur le pouvoir du beau, on ne peut croire que ce ne soit un fait important pour des populations jusque-là des plus ignorantes sous ce rapport d’entrer en communication avec un monde qui leur était fermé, et de recevoir une sorte de demi-initiation à l’art.

Cette initiation n’est d’ailleurs pas gratuite. On exige de l’initié un certain effort, et aussi une dépense qu’on a rendue aussi légère qu’il a été possible. Le ministère de science et d’art n’entend pas organiser lui-même et par lui seul ces expositions. Il ne veut qu’y contribuer. Il fait un appel aux particuliers, « afin que tous les objets qui peuvent être intéressans dans l’étendue du district viennent s’ajouter à ses propres collections. » C’est là un procédé ingénieux et commode pour réaliser à la fois une exposition et une enquête utile à tous. Des mesures doivent être prises par le comité local de l’école ou de la ville pour que les bâtimens soient en bon état et assurés contre les accidens, pour qu’ils soient ouverts tant dans la journée que le soir. Le plus souvent le comité local ne paie que le transport jusqu’au lieu de l’exposition. Des séries d’objets sont toutes prêtes, les pièces sont renfermées dans des cadres et mises sous verre. Ce sont des reproductions de statues ou de dessins, des cartons de grands maîtres, des émaux, des gravures, enfin des photographies noires et coloriées. S’il n’y a pas de demandes spéciales, on envoie ces collections dans les villes manufacturières ou les écoles suivant les besoins présumés. Un droit d’entrée modéré est prélevé, plus faible le soir que dans la journée, afin de permettre aux personnes qui travaillent tout le jour de profiter de ces exhibitions. Les artisans qui étudient dans l’école sont affranchis de ce droit. Deux soirs par semaine, il est fixé à un penny. Nous préférerions sans doute la gratuité absolue, mais alors le comité local n’arriverait pas à couvrir ses dépenses. Il les couvre, et quelquefois même il fait un bénéfice, qui reste acquis d’ailleurs à l’école d’art dont relève l’exposition. Le comité de South-Kensington a organisé en outre, sinon en ce qui concerne les villes, du moins pour ses écoles d’art, le service des bibliothèques roulantes, qu’une société d’hommes de progrès a essayé d’installer en France, mais qui,