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nord-ouest du Caucase, ils font d’abord dans l’Asie-Mineure une invasion passagère, puis, se dirigeant vers l’Occident, vont se réunir aux Gaëls armoricains et à ceux d’Albion, à qui ils communiquent leurs idées religieuses, leur langue et leurs mœurs. Les Cimbres de l’histoire romaine sont les derniers venus de ces Cymris ; ce sont eux qui en passant ont laissé leur nom à la Chersonèse Cimbrique (le Jutland). Toutes ces invasions avaient eu lieu par le nord de l’Europe, surtout par la vallée du Danube ; mais le courant septentrional n’est pas le seul : d’autres tribus aryennes étaient venues avant les Hellènes, avant même les Celtes, en suivant les rivages de la Méditerranée.

Hérodote a soin de distinguer chez les Grecs la souche hellénique de la souche pélasgique ; il regarde la seconde comme autochthone, c’est-à-dire comme ayant occupé la Grèce avant l’autre, dont elle avait fini par adopter la langue. Il y avait aussi des Pélasges en Italie, et il faut croire que ce terme réunissait sous une dénomination commune plusieurs tribus aryennes arrivées en Europe par les bords de la mer ; leur langue, dont le latin, l’osque et plusieurs autres dialectes constituent sans doute des rameaux épars, aurait été, si l’on en croit ces indices, bien plus voisine de celle des Gaëls que la langue grecque. On peut ranger dans la même catégorie les races d’Italie que les historiens considèrent comme les plus anciennes, les OEnothriens, les Sicaniens, les figures, que l’on identifie ordinairement avec les Ibères. Les figures paraissent s’être de bonne heure alliés aux Celtes ; Celtes et Ligures étaient probablement deux fractions du même peuple ayant choisi pour leur migration vers l’Occident des routes différentes ; il est certain que dans la France méridionale, où le fond de la population était ligurien, la plupart des noms de rivières, de peuplades et de localités conservent une étymologie celtique facile à reconnaître.

Dans cette classification des races européennes par la langue, il ne resterait donc en dehors de la famille aryenne que les Basques ou Euskariens et les Finnois, ceux-ci rejetés vers le nord, ainsi que les Lapons, qui paraissent s’y rattacher, les autres cantonnés dans les gorges des Pyrénées occidentales. L’affinité évidente du finnois, de l’esthonien, du magyare, du bulgare, du turc, avec les idiomes des tribus nomades qui habitent le long du Volga et dans la région de l’Altaï a permis de classer toutes ces langues et les races qui les parlent dans la grande famille touranienne, comprenant des peuples distincts des Aryens, par les traits physiques, et dont le langage se réduit par l’analyse à des racines qui ne ressemblent en rien aux racines aryennes. M. Max Müller s’est attaché particulièrement à définir le caractère.de ces langues d’une structure toute spéciale ; il les appelle langues agglutinantes, c’est-à-dire