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Comme les cultivateurs prirent soin de les faire ramasser pendant le labourage, ils purent en détruire un grand nombre. Des le mois de juin suivant, les larves s’enfoncèrent à 35 centimètres pour se transformer en nymphes. Ce changement d’état paraît s’être effectué en moins de deux mois, car dans une tranchée ouverte le 19 août il y avait 111 nymphes et une seule larve. Le hanneton doit rester environ deux autres mois sous cette forme de nymphe, car dès le mois d’octobre on trouve sous le sol des hannetons bien formés et prêts à s’envoler, qui sont mis à nu par les labourages d’automne. Le 13 décembre, il s’en rencontrait 118 dans une seule fouille. Ces coléoptères peuvent donc demeurer enfouis en terre cinq ou six mois, et y attendre patiemment que le développement des feuilles sur les arbres leur permette de commencer leur existence aérienne. Les larves du reste paraissent douées d’une singulière prévoyance. Quand elles quittent les couches superficielles pour exécuter leur mouvement de migration vers les profondeurs du sol, elles devancent les indications du thermomètre. Avant que nul abaissement de température n’ait commencé à se produire, elles sont averties par leur instinct que le froid va faire de continuels progrès, et elles prennent leurs précautions en conséquence. Lorsqu’elles commencèrent de descendre au mois d’octobre 1866, le thermomètre souterrain marquait encore 10° au-dessus de zéro ; quand elles remontèrent vers la superficie au mois de février 1867, il n’indiquait que 7°. Il est vrai qu’il était descendu en janvier jusqu’à 2 degrés 8 dixièmes au-dessus de zéro. Il est bon d’ajouter qu’à ce moment l’insecte a été privé d’alimens pendant plusieurs mois, les radicelles ne pénétrant pas jusqu’aux profondeurs où il s’enfonce, et la faim peut aussi bien que la douceur relative de la température le solliciter à opérer son ascension. Maintenant que nous connaissons bien les habitudes du ver blanc, nous sommes en mesure d’indiquer les moyens les plus propres à nous en débarrasser.


II

Il y a trente ans environ qu’un préfet de la Sarthe, M. Romieu, essaya de propager des méthodes énergiques de hannetonage. Ses efforts ne furent pas accueillis tout d’abord comme ils le méritaient, et la guerre qu’il déclarait aux hannetons fit sourire beaucoup plus qu’elle n’excita de reconnaissance. Peu à peu les dommages causés par ces insectes ont ouvert les yeux de tout le monde, et les chambres d’agriculture, les comices de département, ont réclamé à l’envi des mesures législatives pour arrêter ces désastres périodiques. Voici les préceptes que M. Reiset a déduits des observations