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le saint-père ait ostensiblement déléguées en partant de Rome. Je lui laissai les pièces et pris rendez-vous pour le soir, avant l’heure de l’estafette, voulant vous répondre le même jour. La conférence du soir dura une demi-heure. Les conclusions furent comme le matin : que le cardinal n’ayant que les pouvoirs nécessaires pour la conduite des âmes et les affaires de conscience, suivant les règles ordinaires de la daterie et de la pénitencerie, il ne pouvait en aucune manière, quoique membre du chapitre du conseil du pape, ni en sa qualité de cardinal correspondre avec sa sainteté, ni prendre l’initiative sous quelque prétexte que ce soit, et, pour plus d’exactitude et de solennité dans sa réponse, il la lut notée sur un papier volant, avec quelque développement peut-être, mais de peu de valeur, et qui laissaient le refus de recevoir et de transmettre en son entier[1]. »


M. Giry ne se tint pas encore pour battu. En sortant de chez le cardinal di Pietro, il se rendit chez le cardinal Consalvi, seul membre existant à Rome de la congrégation consistoriale ; mais la congrégation consistoriale, faisait remarquer M. Giry, n’a de commun avec les consistoires qu’une ressemblance de dénomination. A peine avait-il donné lecture de son message à l’ancien secrétaire d’état, que celui-ci lui fit amicalement l’analyse des différentes congrégations encore subsistantes à Rome, et passa avec lui la revue de ceux de leurs membres qui étaient demeurés à Rome et des fonctions qui leur étaient propres. Consalvi conclut en déclarant que personne ne paraissait avoir qualité pour répondre au désir de son excellence le ministre des cultes de France. La déclaration de Consalvi avait été accompagnée de mille protestations de bonne volonté, mais aussi de son impuissance à faire personnellement ce que souhaitait l’empereur. « Je suis en effet de la congrégation consistoriale, avait-il ajouté ; je ne la connais pourtant pas : elle n’a jamais été assemblée depuis que j’en fais partie[2]. » Dans une seconde entrevue avec M. Giry, le cardinal Consalvi lui raconta « qu’il avait pris dans la journée même tous les renseignemens possibles auprès des anciens employés de la congrégation consistoriale afin de savoir s’il était en quelque manière dans les attributions de cette congrégation de prendre l’initiative en cette circonstance et de transmettre sa communication au pape. Il s’en était entretenu avec le cardinal di Pietro, et soit avec celui-ci, soit avec les anciens employés de la congrégation consistoriale, il s’était convaincu de son inhabileté et de son impuissance à agir pour transmettre au pape. » Ainsi l’empereur, répétons-le, se trouvait par son propre fait, c’est-à-dire par suite de l’enlèvement du saint-père et de sa séquestration à Savone,

  1. Lettre de M. Giry à M. le comte Bigot de Préameneu, 5 août 1809.
  2. Ibid.