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litique qui ont été élucidées ici même par un historien qui n’a pas encore dit son dernier mot[1]. Auprès de l’ample et lumineux exposé de M. de Laveleye, les faits financiers que nous avons à faire connaître seront comme un de ces appendices où l’on rejette les documens qui ne sont pas de nature à trouver place dans un récit; nous devons toutefois rappeler, pour l’intelligence de certains détails budgétaires, les bases essentielles du contrat en vertu duquel la Hongrie a recouvré son indépendance.

Depuis les premiers mois de 1867, les états autrichiens proprement dits et les pays autrefois dépendans de la couronne de Hongrie forment deux groupes séparés constitutionnellement, quoique attachés encore l’un à l’autre par des « affaires communes; » le mot est consacré. De chaque côté de la Leitha, le régime parlementaire règne dans la plus stricte signification du mot. Le pouvoir exécutif est occupé par le chef de la maison de Habsbourg, empereur en Autriche, roi en Hongrie. Les affaires dites communes, celles qui forment le lien entre les deux états, concernent l’armée, la représentation diplomatique et les arrangemens douaniers, seuls points qu’il n’eût pas été possible de diviser sans un déchirement dangereux. Pour le maniement difficile de ces affaires communes est institué un ministère commun composé de trois membres; c’est celui dont M. de Beust est l’âme actuellement. Dans chacun des deux états juxtaposés, le pouvoir effectif est exercé par une assemblée nationale et un ministère responsable. Quand un intérêt collectif est en cause, les deux assemblées se mettent en rapport avec le souverain commun aux deux pays, ou pour mieux dire avec le ministère commun qui le représente, par l’entremise de deux délégations élues à cet effet et enchaînées par des mandats formels. Au point de vue spécial des finances, on s’est efforcé de partager équitablement les charges. Aux termes d’un arrangement conclu à titre d’essai et pour dix ans, la Hongrie participe aux dépenses afférentes aux affaires communes, armée, diplomatie et commerce extérieur, dans la proportion de 30 pour 100; elle concourt dans une mesure analogue au paiement et à l’amortissement de l’ancienne dette de l’empire autrichien. Tel est le nouveau contrat social, et l’ancien représentant de la monarchie absolue se trouve, en vertu des clauses compliquées de ce pacte, beaucoup plus enchaîné que ne le serait dans les conditions ordinaires un simple souverain constitutionnel.

Aux premiers momens de l’indépendance reconquise, la Hongrie

  1. Voyez dans la Revue la remarquable série de M. E. de Laveleye sur l’Allemagne depuis la guerre de 1866.