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prolongement proportionnel des parties frontales ou occipitales, et qu’il place les Basques dans la dernière catégorie, en les rattachant aux races africaines. Cette supposition se trouverait en même temps favorisée par divers indices paléontologiques que nous avons signalés et par la réunion présumée du sol de l’Espagne à celui du continent voisin jusque dans un âge très rapproché du nôtre.

Cette hypothèse, seule explication que l’on ait encore hasardée de la présence en Europe d’une race dont la langue a échappé jusqu’ici à tout essai d’analyse, terminera ce résumé d’une foule de notions trop curieuses pour demeurer éparses, mais qu’aucun lien définitif ne réunit encore. La moisson est immense, à peine commencée ; on ne peut en mesurer l’étendue, encore moins en calculer les résultats. Ces sortes de découvertes, loin d’être particulières à l’Europe centrale, se sont déjà répétées dans le sud de l’Espagne, en Algérie, en Sicile et jusqu’en Syrie, d’où M. Éd. Lartet a rapporté des instrumens en silex, recueillis dans les brèches osseuses du Liban, et pareils à ceux de la Dordogne et de la Belgique. Toute synthèse serait prématurée ; il est évident pourtant, selon l’opinion de plusieurs esprits de premier ordre, que les Européens actuels ne sont pas tous de sang aryen, comme on l’a cru pendant si longtemps. Bien des races diverses ont habité notre sol avant l’avènement tardif des Aryens et y étaient arrivées à une sorte de culture et de civilisation relatives. Traversant une longue série de modifications et de progrès, les habitans de l’Europe ont d’abord taillé la pierre pour s’armer, puis ils l’ont adaptée à certains usages ; ils ont façonné les ossemens des animaux, et, s’habillant de leur peau, ils ont longtemps vécu dans des cavernes, chasseurs comme toutes les races primitives ; enfin, quelle que soit la véritable cause de ce changement, ils ont quitté les antres pour des cabanes, ils ont connu l’agriculture, les plantes textiles et alimentaires, possédé des animaux domestiques et fondé des sociétés politiques. Ils ont alors poli la pierre et donné naissance à un peuple puissant dont les dolmens furent les monumens funèbres. On peut le suivre à partir de l’ouest, où il présente une densité plus grande, et d’où il est probablement parti pour s’étendre vers l’est et le sud à travers les grandes vallées ; le Jura, les bords de la Méditerranée vers l’Aude et le Var, semblent marquer la limite de ses ramifications extrêmes. Ce peuple connut l’or, le bronze et une sorte d’opulence grossière ; il est inutile d’insister encore sur la longue durée de rage du bronze et sur les populations de toute sorte que l’Europe renferma dans son sein ; quelques-unes, comme celle des cités lacustres de Suisse, ont laissé des traces nombreuses de leur existence. Certainement toutes ces races n’ont pas disparu en un jour