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attributs, l’égide, le bouclier, la branche d’olivier et même la chouette, ce qui complique énormément le cas du pauvre Jupiter. En résumé, je crois que la naissance de Minerve n’était pas un sujet à peindre et que M. Mazerolle a lutté contre l’impossible ; toutefois il ne l’a pas fait sans talent. L’Apothéose de Psyché, par M. Jules-Louis David, n’est pas exempte de défauts ; cependant elle atteste un notable progrès chez le petit-fils de l’immortel David. On peut à la rigueur terminer cette liste par une grande décoration d’église, signée du frère Athanase, qui paraît être un écolier passable de Mandrin.

La peinture d’histoire est représentée par quelques études dont la plus intéressante est à coup sûr la Femme couchée, de M. Lefebvre. Voici le morceau capital du salon. C’est une Parisienne de dix-huit à vingt ans, bien faite, bien portante et nue, ou plutôt déshabillée sur un lit de repos couvert d’un châle rouge. Le réalisme contemporain n’a rien produit de plus complet, si je ne me trompe. Bon dessin, facture excellente, couleur chaude et certain ragoût de sensualité, je ne sais quelle invite au contentement immédiat qui rappelle la femme en bonnet de Vanloo et les compositions du même style. M. Ingres a peint des femmes aussi nues, l’Odalisque, la Venus Anadyomène, la Source. Pourquoi n’éveillent-elles point les mêmes idées que celle-ci ? Est-ce parce qu’elles n’affichent pas le même rire provoquant, parce que leur nudité est expliquée par des accessoires plus logiques et moins désordonnés que ce châle étendu à la diable avec une précipitation qui en dit trop ? Est-ce parce qu’elles sont vêtues d’une couleur plus austère ? parce qu’on ne voit pas transparaître le sang vermeil de la jeunesse à travers la beauté des formes et la perfection sculpturale du dessin ? Mais l’Antiope du Corrège, la Vénus du Titien à la Tribune de Florence, et, sans aller si haut ni si loin, la Diane, la Vénus, la Naïade de M. Baudry, sont absolument chastes malgré l’éclat de leur jeunesse et la tendresse exquise de leur couleur. Pourquoi nous semble-t-il, à nous qui ne sommes pas prudes, que la Femme couchée de M. Lefebvre parle un autre langage et s’adresse à un autre côté de l’esprit humain que tel ouvrage presque semblable ? Ne serait-ce point par hasard que le talent du peintre s’épure en même temps qu’il s’élève, et qu’un certain degré du beau franchit pour ainsi dire notre sensualité pour toucher le plus noble et le meilleur de notre âme ? M. Lefebvre est un artiste non-seulement habile, mais tout à fait distingué. Il expose, à côté de cette académie de femme, un portrait qui est un tour de force audacieux et réussi. Je ne doute pas qu’il n’arrive au succès de premier ordre, s’il veut gagner les couches supérieures de l’art.

L’Elégie de M. Parrot a passé presque inaperçue, parce qu’elle