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soumise aux commissions financières. Le trait qui la caractérise est exprimée en ces termes par M. Magne dans le rapport du 16 janvier, qui sert de préface au budget : « De 1862 à 1866, le corps législatif a attribué à nos budgets extraordinaires des sommes importantes provenant du reste des anciens emprunts, du produit des obligations trentenaires, des indemnités payées par les gouvernemens espagnol et chinois, des sommes dues par les compagnies de chemins de fer, etc. Ces ressources spéciales sont épuisées. » Ce que M. Magne indique avec la réserve commandée par sa situation est précisément ce que nous avons voulu démontrer par le détail et avec une inflexible sincérité. Notre système financier n’est pas d’aplomb. Les recettes naturelles, celles qui proviennent de l’impôt, n’ont jamais suffi aux dépenses commandées par la politique de l’empire. Les moyens exceptionnels sont épuisés, et en présence des découverts qui sont malheureusement à prévoir il n’y a plus qu’une ressource, c’est l’emprunt direct et franchement avoué.

Cette fatalité se trahit dans les budgets qui sont à l’étude par les faits suivans : le budget de 1867, sur lequel ont porté les dépenses les plus urgentes de l’armement, laisse un déficit de 188,184,000 francs ; — l’exercice 1868 devant supporter les premiers frais d’organisation de la garde nationale mobile, le déficit déclaré dès à présent est de 128,332,563 francs. — On n’en est encore pour 1869 qu’à ces évaluations provisoires qui sont toujours surchargées par le budget rectificatif, et cependant le déficit annoncé monte à 90,638,333 francs. Que les sept derniers mois de l’année courante et l’année prochaine toute entière ne révélassent pas des besoins nouveaux, ce serait un vrai miracle. Nous sommes déjà avertis par le rapport du 27 janvier que de grands intérêts ont été laissés en souffrance. Grâce à l’emprunt, a dit M. Magne, l’essentiel sera fait en ce qui concerne les arméniens ; mais « on se ferait certainement illusion, si on espérait qu’avec l’emploi de ces ressources tout sera fini. » Les dépenses exceptionnelles de la réorganisation militaire, qu’on nous montre en perspective pour 1870, sont déjà cotées pour environ 80 millions : certains travaux exceptionnels des ponts et chaussées exigeraient encore, ajoute le ministre, une somme d’environ 150 millions à répartir sur six ou sept exercices. Depuis la publication du rapport, deux nouveaux projets de loi ont été présentés, l’un qui ajoute une allocation de 115 millions payables en dix ans pour la part contributive de l’état dans l’achèvement des chemins vicinaux, l’autre concernant le quatrième réseau des chemins de fer, et distribuant aux compagnies des subventions qui pourront s’élever jusqu’à 136,100,000 francs. Ajoutons enfin que, si on soulage les budgets courans en payant pendant quinze ou dix-huit mois les intérêts du nouvel emprunt par un