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tout récent avec les villes de Dunkerque et de Bordeaux, qui fournissent l’une 12 millions et l’autre 10.

Après tant d’expédiens et de sacrifices soutenus pendant dix-sept ans, a-t-on conjuré le danger des découverts exagérés, a-t-on retrouvé enfin une allure financière solide et dégagée ? Moins que jamais. Vers la fin de la session dernière, après le vote annuel des budgets, surgit avec l’incident du Luxembourg la possibilité d’une guerre. Il faut transformer et compléter l’armement, remplir nos magasins vidés par la campagne du Mexique, créer cette machinerie nouvelle qui va donner une effroyable activité à l’art de détruire les hommes. Le temps manque pour étudier tout cela, et d’ailleurs la réorganisation militaire n’est encore qu’un projet. Le corps législatif, avant de se séparer, vote d’urgence et sans vérifications un crédit extraordinaire de 159 millions pour les ministres de la guerre et de la marine : 583 millions venaient déjà d’être accordés à ces mêmes ministères par les votes budgétaires des jours précédens. Au mois de novembre 1867, le corps législatif est rappelé. Bientôt le rapport du ministre des finances à l’empereur et les : projets de loi pour la rectification des budgets nous apprennent qu’à part les dépenses militaires l’expédition de Rome, la cherté des vivres, certains mécomptes dans le produit des impôts, l’accroissement prévu de la dette publique, nous infligeront des sacrifices extraordinaires pour les trois exercices qui sont à l’étude (1867-69). Le déficit avoué au commencement de l’année était de 407,554,896 fr., et il est facile de voir actuellement qu’il montera beaucoup plus haut, même en admettant que la paix européenne ne soit pas troublée. Bref, aux termes d’un projet de loi annexé aux budgets, le gouvernement a demandé un emprunt de 440 millions, lequel, avec les frais d’émission et l’allocation supplémentaire des premiers coupons à payer, s’élèverait en réalité à 662 millions. Or la commission du corps législatif vient de déclarer qu’elle croit convenable de réduire l’emprunt à 436 millions effectifs, y compris les frais et l’avance des cinq premiers trimestres ; elle limite la somme qui doit être appliquée spécialement aux dépenses militaires, interdit pour cet emprunt, l’usage des viremens, et prescrit qu’un compte-rendu tiendra le corps législatif au courant de l’emploi des crédits, jusqu’à leur entier épuisement. Personne ne se trompera sur la portée, de cette décision ; c’est un rappel à l’économie et surtout une protestation contre les velléités de guerre qui porteraient le dernier coup à nos finances. Quoi qu’il en soit, ne pouvant prévoir le résultat définitif de ce conflit, nous conservons ici le chiffre de 462 millions demandé par le gouvernement, puisqu’il correspond à des dépenses déjà faites, auxquelles il faudra pourvoir de quelque