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et font entendre bien des doléances sur leur sort. Cela même devient parfois assez plaisant. Les employés du chemin de fer de Paris-Lyon-Méditerranée portent sur leur casquette, qu’on appelle indifféremment le tampon ou la plaque tournante, les lettres initiales P. L. M. Ils prétendent que ces trois lettres signifient : plaignez les malheureux.

La partie de la gare réservée au public, partie extérieure, est sans cesse dans une animation excessive. Ce qui s’y passe, chacun le sait : on prend son billet, on fait peser et inscrire son bagage, on se rend dans une salle d’attente correspondant à la ligne sur laquelle on doit voyager et à la classe de wagons que l’on a choisie. Ces salles, gardées par des agens qui vérifient votre billet, sont spacieuses, garnies de sièges plus solides qu’élégans, et maintenues en hiver à une température égale par de nombreuses bouches de chaleur. L’industrie s’en est emparée, et, grâce à une redevance assez faible, elle a le droit de tapisser les murs de cadres contenant des affiches et des annonces. La gare intérieure, celle qui est consacrée au départ et à l’arrivée des trains, commence au quai, sur lequel s’ouvrent à larges battans les portes des salles d’attente, et s’arrête au souterrain qui passe sous le boulevard des Batignolles. Elle a plusieurs gares d’évitement ; on appelle ainsi une voie latérale supplémentaire où un train peut se ranger momentanément, si, par suite d’une circonstance fortuite, la voie normale qu’il parcourt est occupée. La gare de la rive droite a un inconvénient qui est inhérent à sa destination spéciale, et que rend inévitable son service de banlieue. Dans une gare bien distribuée (celle de Paris-Lyon est, je crois, la plus parfaite), les salles d’attente s’ouvrent latéralement sur le quai de départ. Les voyageurs n’ont donc que quelques pas à faire pour se trouver en face de leurs voitures et y monter ; mais ce système excellent n’est praticable que pour les trains à longs parcours, qui ont deux, trois, quatre départs au plus dans la journée. Le train se forme quelques instans avant l’heure réglementaire, est.amené wagon par wagon et rangé ainsi le long du quai sur la voie qui lui est réservée. Dans une gare qui dessert la banlieue et où les convois se succèdent avec une extrême fréquence (souvent 116 par jour de Paris à Versailles et vice versa), il ne peut en être ainsi. Les trains, composés dès le matin aux deux gares extrêmes, font la navette toute la journée ; celui qui arrive repart presque immédiatement : on se contente de détacher la locomotive ; à l’aide d’une plaque tournante, on la met sur une voie parallèle ; elle s’éloigne jusqu’à l’aiguillage, qui la rend à sa voie spéciale, où elle revient, machine en arrière, reprendre la tête de son train. La gare de l’Ouest dessert trois lignes de banlieue toujours en mouvement : Saint-Germain-Argenteuil, Versailles, Auteuil-Ceinture ; le quai de départ