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A modelé le front d’archange
Avec deux cornes au milieu,

Le sorcier à grande ressource,
Moïse, eut jadis un bâton
Qui faisait du rocher, dit-on,
Jaillir l’eau comme d’une source.

Ce mirifique talisman,
Que tant d’autres ont eu sans être
De grands clercs, — n’a-t-il pas pour maître
Le prince Louis de Rohan ?

Comme l’eau jaillissant du sable
Sous la branche de coudrier,
Il voit du sac de l’usurier
Ruisseler l’or intarissables ;

De droite à gauche, il court sans frein,
Partout la veine s’ouvre prompte.
Et le flot de la dette monte,
Et l’écroulement va son train.

Ruiné ! Sait-il bien lui-même
S’il l’est ? N’a-t-il pas, Dieu merci,
Partout, sans gêne ni souci,
Autant trouvé d’or qu’il en sème ?

Être ruiné, palsambleul
N’est point un mot de gentilhomme.
Perdre, gagner, qu’importe en somme,
Pourvu qu’on prolonge le jeu ?

Et la bataille est poursuivie,
Et l’on puise, plus affolé,
Au fonds toujours renouvelé
De la richesse et de la vie.

Rien d’impossible ou de trop loin !
On se payait la courtisane,
On entretiendra, Dieu me damne,
La reine de France au besoin !


II


Mais qui, par cette heure équivoque,
Attend en effet ce berger ?