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Description géométrique de la France, ouvrage qui a fait sa principale occupation.

Si les observations de précision et d’ensemble étaient forcément négligées à l’établissement royal, on n’en faisait pas moins de très importantes à Paris vers la fin du siècle dernier. L’école militaire possédait un observatoire bâti en 1768 pour Jeaurat, et dans lequel Jérôme de Lalande entreprit de faire la statistique du ciel. L’Histoire céleste française, de Lalande, renferme 48,000 étoiles observées au cercle mural et à la lunette méridienne. Ces observations, que Lalande avait fait commencer en 1782 par Lepaute d’Agelet et continuer ensuite par son neveu Michel-Lefrançais Lalande, n’ont été calculées qu’en 1847 aux frais de l’Association britannique ; elles forment la base du fameux catalogue d’étoiles dont les astronomes font aujourd’hui un usage presque journalier. Des travaux à la vérité moins grandioses, mais d’une utilité incontestable, s’accomplissaient encore dans une foule d’autres observatoires que la misérable situation de l’établissement royal faisait éclore dans tous les coins de Paris. Au collège Mazarin, La Caille avait depuis 1746 un petit observatoire qui passait pour le plus commode de Paris, et dans lequel il a exécuté une série de recherches remarquables ; en 1760, il avait même installé une lunette méridienne. Lemonnier effectua dans la rue des Postes et plus tard au couvent des Capucins de la rue Saint-Honoré une longue suite d’observations de la lune. Delisle, qui de 1710 à 1715 avait eu à sa disposition le dôme du palais du Luxembourg, forma en 1747 à l’hôtel de Cluny l’observatoire de la marine que Messier rendit célèbre par ses nombreuses découvertes de comètes. Delambre a longtemps observé rue de Paradis. Les phénomènes du ciel jouissaient d’ailleurs à cette époque d’une grande popularité. Il était passé en usage que les astronomes les plus renommés se rendissent près du roi toutes les fois qu’une éclipse de quelque importance devait avoir lieu. Ainsi lors de l’éclipse du 26 juillet 1748, Cassini de Thury et La Condamine étaient à Compiègne avec le roi Louis XV pour le faire assister à leurs observations. Les grands seigneurs se piquaient d’avoir chez eux de bonnes lunettes et de savoir s’en servir. Le duc du Maine avait un observatoire à Sceaux, le marquis de Cortanvaux en monta un à Colombes, le roi avait le sien au château de La Muette. L’astronomie était la science à la mode ; on ne lui demandait plus les secrets de l’avenir, mais chacun voulait contempler de ses propres yeux ces mondes mystérieux qu’une sublime invention avait rapprochés de nous. Toute cette agitation ne pouvait aboutir qu’à des résultats insignifians ; les efforts isolés des observateurs mal installés et privés d’instrumens convenables furent