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commence à l’appliquer en France dans les leçons, et les conférences publiques, autant que le permettent les ressources insuffisantes dont les professeurs peuvent disposer.

Nous ne pouvons quitter la géologie sans faire connaître les études d’un savant anglais, M. Ansted, qui intéressent la Corse et par conséquent la France. Près de Bastia se trouve une lagune appelée l’étang de Bigaglia. Cet étang n’existait pas il y a deux mille ans ; des villes, des villages et des forts romains occupaient cet espace. Un mince cordon littoral sépare le marais salant de la mer, avec laquelle il communique par une passe étroite, située à l’extrémité méridionale. Cet étang est entretenu par plusieurs cours d’eau dont l’un est assez considérable. M. Ansted propose d’imiter la conduite des Hollandais, qui ont versé dans l’océan le lac de Harlem, dont les accroissemens devenaient menaçans pour la ville d’Amsterdam. L’étang de Bigaglia menace Bastia, et empoisonne la contrée de miasmes délétères. L’étang supprimé, le pays s’assainira. Un ingénieur anglais, M. Bateman, a rendu ce service aux habitans de Minorque, qui sont aujourd’hui délivrés des maladies qui les décimaient autrefois. En Corse, des terres jadis fertiles, rendues à la culture, indemniseraient largement les entrepreneurs des dépenses que nécessiterait l’établissement des machines d’épuisement destinées à maintenir étanches les terres conquises sur la mer.

La section des sciences naturelles a entendu de nombreuses communications relatives à la zoologie, à l’anatomie comparée, à la physiologie et à la botanique. Tous les points importans de ces diverses branches ont été touchés. Obligé de choisir, je mentionnerai seulement quelques mémoires dont l’intelligence ne nécessite pas de connaissances préliminaires spéciales. L’association favorise depuis plusieurs années l’exploration, au moyen de la drague, du fond des mers qui entourent les îles britanniques. Un naturaliste éminent, enlevé trop tôt à la science et à ses amis, Edward Forbes, avait montré l’intérêt de ces recherches pour la géographie zoologique, la physiologie des animaux inférieurs et la géologie : il avait prouvé que ces animaux se tiennent toujours sensiblement à la même profondeur au-dessous de la surface des mers, comme les animaux aériens se meuvent également dans des limites d’altitude déterminées. M. Gwin Jeffreys est le plus savant et le plus zélé de ces explorateurs. Monté sur son yacht, il sonde les profondeurs de l’océan pour en découvrir les hôtes. Un grand ouvrage sur les mollusques des côtes de la Grande-Bretagne[1] est

  1. British Conchology or an account of the mollusca which now inhabit the British isles and the surrounding seas, 4 vol. in-8o.