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industries réunies, celle du lin et celle du jute, ont pris un développement prodigieux, et M. J. Warden, dans une communication à la section de statistique de l’Association britannique à laquelle nous empruntons la plupart de ces chiffres, estime le capital engagé dans les filatures de Dundee et des environs à la somme considérable de 118 millions de francs. Aussi la population sédentaire de Dundee atteint-elle 100,000 âmes ; elle a donc quadruplé depuis soixante ans.

Quelques industries accessoires moins importantes ont contribué à cet accroissement : telles sont la filature du chanvre, la fabrication des toiles à voile, la pêche de la baleine et des phoques. L’huile de ces animaux est employée dans l’apprêt des tissus de chanvre du Bengale, et, loin d’être tributaires de la marine d’un autre port, les négocians de Dundee envoient eux-mêmes des baleiniers dans les mers du nord. Ce sont de beaux navires à hélice qui accomplissent chaque année deux voyages dans les régions arctiques. Au commencement de mai, ils partent pour le Groenland, où ils se livrent à la chasse des phoques, principalement aux alentours de l’île de Jan May en[1]. Les glaces flottantes qui l’entourent sont couvertes de légions de phoques si nombreuses que le navire le Camperdown revint une année à Dundee chargé de 260,000 kilogrammes d’huile, produit de 20,000 phoques tués en une seule campagne. On cite peu d’exemples semblables. Le mauvais temps, les brumes, l’état des glaces disloquées, séparées les unes des autres et ballottées par la houle, sont des obstacles que les équipages les plus énergiques ne peuvent pas toujours surmonter, et une pêche de 3,000 phoques est considérée comme très rémunératrice pour les armateurs. Revenus à la fin de mai de leur première campagne, les navires déchargent leur cargaison et repartent immédiatement pour la pêche de la baleine. Ils se dirigent vers la mer de Baffin, en traversant le détroit de Davis ; mais la pêche ne commence que près de l’île Disco, située sur la côte orientale du Groenland. De là, les navires s’avancent à travers les glaces vers la baie de Melville, atteignent le cap York, et, contournant le fond de la mer de Baffin, ils gagnent la baie de Pond, où les baleines étaient jadis très communes ; ils reviennent à la fin d’octobre par les côtes occidentales du détroit de Davis. Une grosse baleine donne 20,000 kilogrammes d’huile valant 37,500 francs, et il n’est pas rare qu’un navire en capture quatre ou cinq dans sa campagne d’automne[2].

  1. Voyez, sur cette île, la Revue du 15 août 1863.
  2. James Yeaman, The seal and whale Fisheries of Dundee.