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sera question de la pisciculture, nous nous bornerons à mentionner ici une machine à fabriquer les filets, de M. Jouannin, mécanicien à Paris. Cette machine, qui marche à la vapeur, fait le nœud du pêcheur et donne sur chaque bord une lisière à boucles. Elle emploie indifféremment le chanvre ou le coton et fabrique toute espèce de filets. Une machine de 1/4 de cheval-vapeur, qu’une seule ouvrière peut diriger, fait 250 mètres de filets de hareng par jour, c’est-à-dire plus de 400,000 nœuds. Cette découverte récente aura pour effet de diminuer dans une notable proportion le prix de ces engins et par conséquent de permettre à un plus grand nombre de pêcheurs d’équiper des navires à leurs frais ; lorsque la tempête, comme cela arrive trop souvent, emporte dans une nuit tout leur matériel, ils pourront, sans de trop lourds sacrifices, réparer ce désastre.

Parmi les produits de la pêche, il faut ranger encore le corail et les éponges. Les expositions française, italienne et grecque étaient sous ce rapport les plus complètes. Le corail est à la fois le produit et le support de certains polypes marins qui se logent dans les enfoncemens cellulaires dont la partie extérieure est criblée. Il présente l’aspect d’un arbrisseau rameux dont le tronc ne dépasse pas 25 millimètres ; il est formé d’une substance calcaire disposée en couches concentriques d’un grain très fin, d’une grande dureté, facile à travailler et à polir. La couche extérieure, constituant ce qu’on nomme l’écorce, est grisâtre et parsemée de tubercules dont le sommet offre une ouverture divisée en huit compartimens. À l’intérieur, le corail est rouge vif ou rosé. Ce polypier adhère aux rochers à une profondeur variable, tantôt à fleur d’eau, tantôt à plus de 200 mètres. On ne l’a rencontré jusqu’ici que dans la Méditerranée, près de Marseille, sur les côtes de la Corse, de la Sardaigne, des îles Baléares, près de Tunis et de La Calle. Ce dernier point, qui fait maintenant partie de nos possessions d’Afrique, est celui d’où le commerce tire la plus grande quantité de corail. Dès 1450, la France y avait un établissement qui subsista jusqu’en 1791, époque à laquelle il passa dans les mains des Italiens. — Depuis 1830, la pêche de La Calle est de nouveau régie par l’administration française, et les étrangers qui s’y livrent sont soumis à une redevance dont nos compatriotes sont exempts. C’est à Livourne que se vend la majeure partie du produit récolté ; il existe dans cette ville quatre grands établissemens, employant chacun plus de 200 ouvrières au polissage du corail et à la fabrication de divers objets d’ornement, colliers, bracelets, camées, bagues, cachets, dont la plus grande partie est expédiée en Russie et dans les Indes orientales. Les débris de cette fabrication, porphyrisés et aromatisés avec de la menthe,