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seraient devenus, si on les avait traités comme tels ; mais il n’hésita point à faire casser par un arrêt du conseil tous les arrêts rendus sur l’instance du duc de Rohan. Notifié aux états avant leur séparation, cet acte portait que « le parlement de Bretagne ayant autorisé diverses réunions séditieuses menaçantes pour l’autorité de la monarchie et l’unité de la France, il était fait défense audit parlement d’entreprendre à l’avenir aucune chose touchant l’assemblée, le lieu et l’ordre de convocation des états. »

Cette compagnie, loyale au fond et très dévouée à l’autorité monarchique, songea d’autant moins à prolonger une résistance inutile que le duc de Rohan, ayant jeté le masque, luttait l’année suivante derrière les murs d’Angers contre l’armée mazarine du maréchal d’Hocquincourt. Avant même que la guerre civile fût complètement terminée, elle reprit envers la couronne les traditions de respectueuse obéissance dont elle s’était un moment écartée sous l’influence générale à laquelle avait cédé toute la magistrature du royaume. Battu par les états, le parlement le fut aussi par la chambre des comptes, par suite de la réaction anti-parlementaire que provoqua le triomphe de l’autorité royale. Étouffée entre la cour des comptes de Paris, le parlement et les états de la province, la malheureuse chambre de Nantes, dont l’histoire se résuma durant les deux derniers siècles dans un gémissement continu, voyait le terrain de ses attributions de plus en plus resserré par les nouveaux agens administratifs que créait chaque jour la couronne. Un règlement de 1625 lui avait réservé toutes les questions touchant à la réformation du domaine ; mais d’une part les délégués directs de l’autorité royale n’admettaient pas qu’ils pussent demeurer étrangers à l’administration des propriétés du roi ; de l’autre, les présidiaux et le parlement trouvaient étrange de voir en matière contentieuse les commissaires des comptes rendre des arrêts à la seule fin de laisser à leur chambre quelque chose à faire. Elle ne se maintenait guère en effet que par le prix de ses charges, auquel le trésor n’était pas en disposition de renoncer. Afin de conserver des fonctionnaires, il fallait bien s’ingénier pour leur conserver des fonctions ; le roi prononça donc l’annulation par arrêts de son conseil de tous les arrêts rendus à Rennes au détriment de la chambre de Nantes. L’un des plus constans soucis de l’ancienne monarchie, ce fut de créer des attributions aux agens nombreux qui achetaient à l’enchère le droit de faire quelque chose.

Les états se montrèrent vis-à-vis du parlement moins modérés que ne l’avait été la cour. A l’assemblée de Vitré, ils parurent poursuivre une vengeance bien plus qu’une victoire, et si la royauté avait déféré à tous leurs vœux, c’eût été sans nul doute au