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nos amis et ennemis ceux de la France, et à nous mettre dans un état de guerre perpétuelle qui répugnerait absolument à notre caractère et à notre ministère de paix, nous nous voyons dans l’impossibilité d’y adhérer.

« Par quelles raisons devrions-nous nous exposer au danger ou plutôt à la certitude de voir défendues en Angleterre les communications spirituelles que nous entretenons maintenant librement avec les catholiques de ce pays, défense qui aurait lieu aussitôt que nous entrerions dans un système permanent d’inimitié contre cette puissance pour une cause qui nous est entièrement étrangère ? Par quelle raison le projet veut-il nous obliger à renoncer sans aucun dédommagement aux droits du saint-siège à l’égard de l’investiture du royaume de Naples, et à la souveraineté sur Bénévent et Ponte-Corvo, pour laquelle le décret même qui nous la ravit nous avait promis une indemnité ? Par quelle raison devons-nous nous engager à porter le nombre des cardinaux français au tiers du nombre total du collège, en renversant ainsi les constitutions fondamentales du saint-siège, et ouvrant la voie à d’autres demandes semblables et proportionnelles de la part d’autres cours catholiques, et aux conséquences qui en résulteraient nécessairement, d’après ce que l’histoire de l’église nous apprend ? Par quelle raison devons-nous nous charger de tant de dépenses, et nommément de celle de 400,000 francs par an pour le curage du port et pour l’augmentation des fortifications d’Ancône, opérations qui, au lieu de nous être utiles, ne pourraient que nous causer un sensible dommage ?… Enfin nous voyons avec infiniment de chagrin que le projet ne fait pas seulement la moindre mention des affaires ecclésiastiques qui sont l’objet de nos réclamations et de votre envoi à Paris ; nous voyons en un mot que nous sommes traité comme ennemi. Voilà le fruit de notre voyage à Paris, de notre patience, de la longanimité qui nous a porté à faire tant de sacrifices, à souffrir tant d’humiliations. Dans cet état de choses, comme les deux conditions que nous avons prescrites dans la dépêche du 11 novembre n’ont pas été adoptées, et qu’au contraire on exige de nous différentes choses, nouvelles et inadmissibles, nous ne pouvons en aucune manière adhérer à un traité qui serait attentatoire à la liberté et à l’indépendance de notre souveraineté.

« Si donc on persiste dans de pareilles prétentions, vous pourrez immédiatement demander votre passeport et partir ; nous avertissons aussi notre cardinal-légat, à qui, nous entendons que cette lettre soit communiquée, de se tenir prêt pour partir au premier ordre qu’il pourra recevoir de nous. La conduite qu’on observera envers nous après la réception de cette réponse de notre part nous fait juger si son rappel est nécessaire. »


A partir du jour où cette réponse du pape fut parvenue à Paris,