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suivans, qui ne manquent pas de justesse. Il existe, dit l’auteur, des végétaux qui ne se montrent que dans des circonstances tellement exceptionnelles qu’il est impossible de nous en figurer les semences encombrant l’atmosphère pendant des siècles pour ne féconder qu’à de rares intervalles quelque point du globe. On connaît un champignon qui ne se développe que sur les cadavres d’araignées, un autre qui naît seulement sur les sabots de chevaux en décomposition. L’isaria n’a encore été observé que sur certains papillons nocturnes ; ce sont d’autres espèces qui envahissent les larves et les chrysalides. Hooker a fait connaître un champignon qui atteint des dimensions considérables (de 10 à 12 centimètres) » mais qui ne se rencontre absolument que sur le cou d’une certaine chenille des contrées tropicales. Il végète sur l’animal, y fructifie, et la chenille l’enterre avec elle dans le sol, d’où il s’élance comme un panache funéraire. Faut-il donc, dit M. Pouchet, que l’air ait été bourré de semences pour qu’il en tombe une de temps à autre sur une araignée morte ou sur le cou d’une chenille ? Comme un végétal particulier envahit chaque espèce de fermentation, il faudrait également que les germes de tous ces microphytes se fussent promenés dans l’atmosphère depuis la création jusqu’au jour où l’on inventa une nouvelle liqueur fermentée. Bien plus, on connaît un végétal singulier, le racodium cellare, qui n’a jamais été rencontré que sur les futailles des celliers, et un autre qui ne vit que sur les gouttes de suif que les ouvriers laissent tomber sur le sol des mines. Les semences de ces végétaux sont-elles restées sans emploi depuis l’origine du monde jusqu’au jour où elles ont trouvé leur terrain ?

Tout cela paraît en effet d’une logique irrésistible ; mais, en y regardant de près, on ne peut s’empêcher de reconnaître que les preuves sont toutes purement négatives (comme celles d’ailleurs qu’on a fait valoir contre les générations spontanées), et il ne paraît pas que la lumière puisse se faire de si tôt sur ces choses obscures. M. Pouchet, entraîné par l’ardeur de son tempérament, traite de fables puériles les opinions de ses adversaires, et décerne le titre d’illustres à tous les savans estimables qui se sont rangés de son côté. Ne craint-il pas de faire parfois sourire le lecteur ? Disons, pour terminer, que le volume en tête duquel il a placé son nom, pour nous servir de ses expressions, renferme quelque chose comme trois cent cinquante gravures, et qu’il est d’une lecture agréable et facile.

Un ouvrage plus sérieux et plus important est celui que M. Émile Blanchard, de l’Institut, vient de publier sur les métamorphoses et les mœurs des insectes. Il renferme un nombre considérable de figures qui représentent les espèces dans leurs véritables attitudes, et qui sont remarquables par le soin minutieux apportée la reproduction fidèle de tous les détails et par une exécution des plus soignées. M. Blanchard,