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du sud tous les dix mille cinq cents ans. La théorie des révolutions périodiques de la mer renferme toutefois une grave contradiction. Elle a pour point de départ la précession des équinoxes. C’est ce lent balancement de l’axe terrestre qui, d’après Adhémar, en troublant sans cesse l’équilibre de chaleur entre les deux hémisphères, occasionnerait une accumulation périodique de glaces à l’un des pôles ; mais l’épaisseur finale que l’auteur de la théorie assigne à la glacière polaire est telle qu’elle annulerait presque l’aplatissement terrestre, qui précisément produit la précession des équinoxes. L’effet détruirait donc ici la cause.

En abordant l’étude détaillée du relief terrestre, M. Reclus présente sur le rôle comparé des plateaux et des plaines des considérations fort intéressantes. Les parties de la surface où la vie planétaire se manifeste avec le plus de régularité, mais en même temps avec le moins de force et de variété, sont les contrées dont le niveau ne varie que faiblement. En revanche, ces régions sont devenues les siège prédestiné de l’humanité et de la civilisation. Ce ne sont pas toutefois les terres basses, les plaines proprement dites, qui jouent le rôle le plus important dans l’histoire du globe ; ce sont les parties saillantes, les plateaux. L’élévation graduelle de ces vastes intumescences continentales dans la direction du nord au sud prolonge en quelque sorte la zone tempérée au-delà des tropiques, en transportant le sol dans les couches supérieures de l’atmosphère. « Ainsi, dit M. Reclus, la fonction des hautes terres dans l’économie du globe est de porter le nord au soin même du midi, de rapprocher tous les élémens de la planète et toutes les saisons de l’année. Tous les plateaux sont pour ainsi dire de petits continens émergeant du milieu des plaines, et comme les grands continens limités par la mer, ils offrent dans l’ensemble de leurs phénomènes une espèce de résumé de ceux de la terre entière ; ce sont autant de microcosmes. Centres vitaux de l’organisme planétaire, ils arrêtent les vents et les nuages, épanchent les eaux, modifient tous les mouvemens qui s’accomplissent à la surface du globe. Grâce au circuit incessant qui se produit entre toutes les saillies du relief continental et les deux océans des eaux et de l’atmosphère, les climats étages sur les flancs des plateaux se mêlent diversement, et mettent continuellement en rapport les unes avec les autres les flores, les faunes, les nations et les races d’hommes. »

La description des plaines, des prairies et des déserts ne forme pas l’une des parties les moins intéressantes de l’ouvrage. M. Reclus nous fait parcourir successivement les landes françaises, les bruyères de la Hollande, la puszta magyare, les steppes et les toundras de l’empire russe, les déserts de l’Afrique et de l’Asie, les pampas de la Plata et les llanos de la Colombie, esquissant en traits rapides les principaux caractères de ces immensités monotones. Citons au moins une remarque relative au tchornosjom (terre noire) de la Russie méridionale. Cette vaste