Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/974

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sadowa, la grande majorité de ces populations trouva un système auquel elle put se rattacher et un homme d’état capable de la conduire. Centraliser à Vienne tout juste assez pour maintenir l’unité politique de la monarchie, respecter autant que possible l’autonomie de chaque groupe de l’empire, pratiquer la paix en acceptant franchement la nouvelle situation internationale, tel fut le système. L’homme fut M. de Beust.

Les troupes prussiennes campaient encore sur le sol autrichien lorsqu’un petit groupe de députés allemands se réunit à Aussee pour se concerter sur les douloureuses éventualités en présence desquelles on se trouvait placé tout à coup. On fut d’accord que la continuation de la lutte militaire était impossible. C’était par sa faute que l’Autriche perdait ses positions dans la confédération germanique. Elle n’avait pas su dire à ces princes et à ces populations, déjà irrités des procédés cavaliers de M. de Bismark, comment elle comprenait la réorganisation de l’Allemagne. Elle n’avait rien fait pour intéresser le sentiment national allemand aux succès de l’armée de Benedek, et à l’intérieur elle avait étouffé l’esprit public en suspendant l’action du reichsrath. Nul n’était préparé à cette guerre si déplorable et si déplorée même en Allemagne. Le mieux était de la terminer au plus tôt, car on ne pouvait pas penser à provoquer de ces réveils de patriotisme, de ces explosions vigoureuses de haine qui vengent une défaite. Il n’y fallait pas songer, parce qu’on eût risqué de jeter les Slaves dans une voie politique conduisant tout droit à l’abaissement des Allemands de la monarchie autrichienne. Trop faibles désormais pour imposer à l’Autriche la forme d’un état centralisé qu’ils avaient un instant rêvée, les députés allemands du reichsrath réunis à Aussee se résignèrent à abandonner leur ancien projet de contraindre les Magyars à figurer dans une assemblée politique à Vienne. Les objections qu’on avait élevées contre l’existence de la Hongrie comme état indépendant de la monarchie autrichienne tombèrent, et on fut d’avis d’accepter le rétablissement de la constitution, hongroise, à la condition que la diète de Pesth prendrait équitablement sa part des charges générales de la monarchie. C’était une alliance qu’on demandait au lieu d’exiger une incorporation. On a vu comment l’idée avait été accueillie à Pesth lors de la discussion du projet de loi sur les affaires communes. L’accord vient d’être définitivement scellé par les deux délégations réunies à Vienne pour fixer la quote-part de la Hongrie et des pays cisleithans dans les dépenses générales ; mais, pour arriver à ces résultats qu’on entrevoyait à Aussee, il fallait une discussion libre. Les Allemands en avaient le naturel pressentiment, et ils demandaient le développement des promesses libérales